Vous connaissez peut être Christoph Chassol pour ses chroniques sur France Musique tous les jeudi à 8h50, où il décortique des morceaux à l'aide d'une formation musicale poussée au conservatoire et au Berklee College of Music de Boston.
C'est aussi un artiste accompli signé sur le label français Tricatel. Tirant parti d'un don pour l'harmonisation, d'une habitude sous corticale à solfier et de goûts musicaux tous aussi divers que pointus, il a créé une technique musical propre qu'il nomme "ultrascore". Il s'agit d'une "harmonisation du réel" qu'il définit comme tel : « un ultrascore, c’est une musique de film qui utilise tous les sons du film pour se construire elle-même ». Il nous fait ainsi vivre une forme de synesthésie. Inspiré de la musique concrète et répétitive de Steve Reich ou Pierre Shaeffer, tout autant que de la musique pop et jazz, il créé des univers poétiques harmonisés depuis des sons et des images réelles. Il a ainsi harmonisé un voyage en Inde sur son projet Indiamore ou bien sa native Martinique sur le projet Big Sun. Le travail mélodique omniprésent n'en dilue pas pour autant une recherche rythmique primordial. En effet il s'agit bien de changer la mélodie et le rythme de la réalité pour créer cette autre perception de réalité.
Cette autre perception de la réalité répond à d'autres règles et concepts, ceux de la musicalité, de l'harmonie, de la mathématique. Voilà la thématique qui ouvre le 6ème album de Chassol sorti en mars 2020. Christophe Chassol y harmonise sur les trois premier titres le livre Le jeu des perles de verre, écrit anticipatoire de Hermann Hesse lui ayant valu le prix Nobel de littérature en 1946. Au centre de l'intrigue est une sorte de boulier qui permet le calcul et la compréhension de la musique, de la culture et par extension de l'univers. Un boulier qui rend visible l'invisible.
S'en suit une variété de tableaux reliés par une thématique commune : le jeu. Il est décliné dans tous ses concepts, que ce soit le génial Savana, Céline, Aya avec les jeux de la cours de récréation, Dribbles & Beats sur un terrain de basquet ou bien toute une partie rendant hommage aux jeux vidéos avec leurs musique 8 bits.
Dans cette diversité le but est pourtant constant : "montrer le pouvoir incroyable de la musique" dans une construction virtuose. A travers cette reconstruction sonore et visuelle de nos perception, il nous donne à voir une réalité toute personnelle, magnifiée et irrésistible.
C'est à écouter par ici sur Spotify et pour tous les curieux, n'hésitez pas à vous replonger dans ces différents projets audio-visuels qui valent vraiment le détour.
Je vous recommande aussi son interview sur France Musique où il parle longuement de cet album et de son approche tout particulière de la musique, c'est par ici.
Etienne
A force d'en entendre parler (en bien) un peu partout, je crois que je vais m'y plonger sérieusement. Le type a effectivement l'air passionnant.
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