Après le Twin Shadow sorti la même année, je vous propose de (re)découvrir cet incroyable morceau de l'énigmatique groupe Pacific!, une chanson immortelle qui sonne comme si Brian Wilson des Beach Boys avait bossé avec Roxy Music, Sébastien Tellier et New Order. Autant dire que c'est une perfection pop indépassable.
Je n'ai que de vagues souvenirs de cet album, et j'ai à peine accroché aux suivants. Mais ce morceau de Twin Shadow en particulier m'a souvent hanté, tout au long de ces années qui feront bientôt une décennie. "When We're Dancing" commence d'une façon déstabilisante, avec des synthés détunés, qui sonnent cassés, fantomatiques. Et puis la boîte à rythme, la basse, la guitare s'installent et le groove funky emporte tout, magnifié par une voix de crooner psychédélique. C'est assez unique, c'est mystérieux, c'est mélancolique, c'est joyeux et triste en même temps, et lorsque la guitare solo débarque en fin de morceau c'est carrément cathartique.
Jerry Butler, 1968 - Never Gonna Give You Up - The Black Keys, 2010
Dernier volet de ce mini-cycle sur les reprises un peu inattendues (la suite sera pour plus tard, vous verrez on a pas mal de choses à vous faire écouter dans les jours qui viennent...) L'originale est un classique soul un peu oublié, de Jerry Butler. Checkez cette merveille ci-dessous :
La reprise est issue de l'album Brothers, des Black Keys (2010). Ils en donnent une version très sombre, moite et toute en tension, qui figure parmi leurs meilleurs titres. Cf ci-dessous :
PS : à cause de Rick Astley, pas facile de les trouver sur youtube celles-là.
«I want to drive you through the night, down the hills»
Vous mettez
cet album dans l’autoradio. Et vous conduisez toute la nuit. Pour
aller où ? Là n’est pas la question.
Le choix d'Etienne :
Bot'Ox - Babylon By Car ( 2010 )
Dans "ma" médiathèque comme dans beaucoup de médiathèques les compilations sont placées en premier dans le rayon d'un genre. J'ai donc découvert ce groupe quand, pour la première fois de ma vie, j'ai mis mon nez dans cette section, et ceci dans le rayon électro. J'ai alors choisi, au hasard, la pochette qui m'inspirait le plus, en l’occurrence un terrain de foot in-door avec pour but des enceintes et surtout un label dont le logo était un cadi. Peut être cela me rappelait-il le Super Discount d'Etienne de Crecy. Cette compilation très sympa sortie en juin 2009 c'est Various Moments Of Crisis, petit récapitulatif des productions de Cosmo Vitelli sorties sous son label parisien I'm a Cliché depuis sa création en 2004. On y trouve de grands noms comme Yuksek ou Etienne Jaumet de Zombie Zombie et des noms moins connus. Mais il y a surtout deux morceaux Crashed cadillac et Car Jacked, du groupe de Cosmo Vitelli, Bot'ox, qu'il constitue avec Julien Briffaz depuis 2005. C'est très précisément Crashed Cadillac, pour lequel je suis tombé viscéralement amoureux et que j'ai du écouter en boucle pendant plus d'une heure en le découvrant, mon canapé se goinfrant de mon postérieur. Ce titre m'a donc logiquement mené découvrir ce groupe et cet album dont sont tirés les deux morceaux.
La compilation Various Moments Of Crisi
D'abord petit présentation des deux membres du groupe car c'est passionnant. Et je précise que les deux artistes, venant au départ d'univers musicaux différents, ont eu et ont des carrières solos/groupes de leur côté mais ils s'unissant à l'occasion pour ce projet, comme ce fut le cas pour Babylon Car ou Sans Dormir, leur second album sorti en 2013.
Julien Briffaz a commencé la musique dans le rock, mais étudiant il fonde BrifRec, premier label à signer de la House minimaliste en France, comme ARK ou des remix de Mr oizo. Il se tourne donc vers la House et créer avec Loïc Le Guillon, le duo [T]ékël. Il fonde aussi le studio La Truite où il a pu collaborer avec Para One ou Syd Matters.
Benjamin Boguet ( aka Cosmo Vitelli ) débute lui sur groupe indé ( "Perio" ) dans la première partie des 90's. Puis sa carrière commence en 1997 avec la sortie d'un maxi du nom de Comso Vitelli sous le label d'Etienne de Crecy, Pierre-Michel Levallois et Alex Gopher, Solid. Après ça il se fera DJ et mixera dans de nombreux clubs européens et sort en parallèle quelques titres et remixs. En 2001 il sort le tube qui fera exploser sa carrière, Part Day, repoussant ainsi celle de son premier album, Clean, en 2003, et lui laissant alors le temps de participer à l'enregistrement de 10 000 Hz Legend de Air.En 2004 il créer le label I'm a Cliché, permettant de faire émerger des artistes comme Yuksek. Puis en 2005 il créer Bot'ox et vous connaissez la suite.
Cosmo Vitelli à gauche, Julien Briffaz à droite
Pour ce qui est de l'album, c'est un "road trip" dense et cadencé, ou s'entrelace bruits, sons électro et guitares rock pour en rendu entre dream-pop et krautrock. Le thème automobile est annoncé dés le nom de l'album et repris sur les différents titres, et culmine sur l'excellent Crached Cadillac. En effet l'ambiance sombre nous emmenant au bord de la désorientation spatio temporelle. Parfait pour rouler au rythme des jonctions de pavés de béton vieille autoroute allemande, à la lueur du crépuscule. Un autre titre se démarque, et constitue même le meilleur morceau de l'album, c'est Blue Steel, dont je souligne le sublime clip. Il est intéressant de constater que leurs concerts se faisaient en live instrumental ( ils jouent guitare électriques ... ) ce qui n'est pas très courant pour ce genre de musique.
Leur bon, mais peut être inférieur, deuxième album, Sans Dormir est sorti en novembre 2013, même si on avait pu découvrir au fil d'un très original fractionnement de cette sortie à un rythme trimestriel. ( tous les 3 mois sortait 1 ou 2 titres, avec des remixs de ceux-ci, jusqu’à aboutir en novembre à l'album en entier ).
Et en bonus, Human After All ( et merde à ceux qui me chieront à la gueule ! ), juste parce qu'avec ce thème je ne peux m’empêcher de penser à cette sublime scène du film Electroma et à cette ferrari 412 de 1987 que vous auriez pu acquérir au prix de 25 000£ sur ebay, au profit des sinistrés du tsunami au Japon.
Etienne
P.S. : Ne vous inquiétez pas, si Alexandre n'a pas encore publié son choix, ce n'est pas le début d'une rupture entre nous, mais bien car il est très très très occupé en ce moment. Alors patientons tous jusqu'à ce soir ou demain.
Pink Floyd - The Piper At The Gates Of Dawn ( 1967 )
Deux albums dont la filiation plastique m'a sauté aux yeux, je ne sais pas pour vous. Peut être parce que ce sont mes deux albums préférés dans les discographies respectives de ces deux groupes ( sur ce que j'en connais en tous cas ). Malgré 46 ans les séparant, ces deux albums de ne sont pas si éloignés, tant au premier coup d’œil par ces deux pochettes d'images répétées et fusionnées annonçant de façon enfumée et échogène le contenu, qu'à l'écoute par ce style rock psychédélique en commun. Ainsi l'un est le père du genre, tandis que l'autre un des derniers nés. Mais les fondements restent les mêmes avec leurs guitares lacérées et agressives, leur chant échogène, leur "basse de précision", une tension omniprésente et cette gravité dans l'ambiance.
Pourquoi ces disques ? Excellente question, tout d'abord parce qu'ils sont tous deux excellents, dans un genre plus ou moins discoïde ("Diana" a été produit par Chic, maîtres du genre, versant funky, et "This Is Happening" rappelle entre autres les meilleures pages du disco synthétique des années 70-80).
Tous deux possèdent d'énormes tubes, comme "Dance Yrself Clean" pour LCD Soundsystem, où James Murphy concrétise ENFIN sa formule à base de crescendos infernaux dont il a le secret, non pas par un mais deux climax. Brillant. On retrouvera pêle-mêle, dans l'album : le Velvet, de l'indus, l'ombre de Bowie période "Heroes", de la synthpop, et beaucoup de disco donc, en mode électronique. Un voyage à faire absolument. Et encore, ce n'est pas son meilleur disque, c'est vous dire le talent du gars.
Si on parle tubes chez Diana Ross, on peut citer tout l'album, mais les plus immédiats sont surtout "Upside Down", et surtout le génial "I'm Coming Out", une des plus grandes réussites de la Chic Organization. Que l'on soit dans un domaine purement disco, ou dans des ballades plus soul-pop façon Motown, Dirty Diana assure. Et pas qu'un peu. Un très grand disque.
Mais et les pochettes alors ? J'y viens. Car outre le genre musical, ces albums possèdent quelques similitudes, graphiques cette fois-ci. Tout d'abord, ce qui saute aux yeux, c'est l'utilisation futée de la pochette du vinyle pour y insérer une photo plus grande, format portrait. Ce qui nous permet de voir James Murphy s'éclater comme un fou en dansant, et d'admirer Diana.... être Diana, tout simplement. Les deux photos, noir et blanc, sont en outre plutôt classes.
Même si ce type de pochette n'est pas exclusif à ces deux disques, il n'est pas interdit de penser que Murphy, fan de disco, ait été inspiré par le classique qu'est "Diana". Personnellement, dans ce genre de cas, je ne crois pas aux coïncidences. Et vous ?
Pour clore (pour le moment) ce petit cycle concernant les clips, je ne pouvais pas passer à côté de ce petit monument. Personne n'avait vu aussi dingue et grandiloquent depuis Michael Jackson, qui a en partie inspiré ce clip (on voit même une statue géante de lui, et Kanye a toujours voué une admiration sans bornes devant MJ). J'ai dit dingue et grandiloquent ? J'aurais pu ajouter mégalo, etc... Mais surtout incroyablement beau et réussi. Car West a toujours eu un côté arty, et un goût pour l'avant-garde assez sûr, avec pour but de le transmettre aux masses en l'intégrant dans une œuvre assez intelligemment dosée entre accessibilité et radicalité.
Pour situer le contexte : nous sommes en 2010, Kanye West a fait très fort avec ses derniers albums, à la fois en terme de succès populaire, artistique et critique. Mais le gars a encore plus d'ambition, et il accouche d'un projet complètement dingue et génial, qu'on pourrait qualifier de hiphop opera, nommé My Beautiful Dark Twisted Fantasy. D'où ce clip, sorti pour promouvoir l'album, mais pas seulement. Oh que non. Déjà, il y a la durée, plus de 34 minutes. Pour la bande-son de ce petit film musical, on a droit à de nombreuses chansons de l'album en question, parfois dans des versions légèrement remaniées (le remix de "Power"). Comme l'album est génial, on est vraiment gâtés.
Question scénario, on peut résumer ça comme ça : une femme-oiseau (je n'ose dire harpie tellement la demoiselle est gracieuse) tombe du ciel, et est recueillie par Kanye West qui passait par là. Evidemment, il tombe amoureux de cette femme intrigante, et elle semble aussi se prendre d'affection pour son hôte. A la suite de quoi, Kanye essaie de l'aider à s'intégrer dans notre monde si cruel, mais comme vous le devinez, elle n'y est pas prête, et cela aboutira à une fin que je ne vous révèlerai pas ici. Regardez donc ce petit bijou pour savoir !
Cette vidéo en forme de parabole arty est très imagée, bourrée d'allégories, de références subtiles, écrite comme une tragédie, et est surtout d'une poésie rare pour un clip, a fortiori dans le milieu du hiphop. Une œuvre ambitieuse, mais qui est à la hauteur de ses ambitions. Et ces images, quelle beauté ! La direction artistique est plus qu'impeccable. Et malgré quelques grosses ficelles, c'est probablement un des meilleurs films musicaux jamais sortis. Je ne vais pas partir dans des explications philosophiques ici, sauf si quelqu'un me demande de faire une dissert sur le sujet "pourquoi trouves-tu ce clip aussi bon". J'aurais des tas d'arguments à sortir, mais là n'est pas le propos de ce court billet.
Un vrai clip, aussi impressionnant qu'un blockbuster et artistiquement parfois presque aussi exigeant qu'un court métrage arty, qui apporte énormément au genre et ne consiste pas en un passage obligé pour vendre du mp4 iTunes à la chaîne, ça devrait vous brancher non ?
ALEXANDRE
L'avis d'Etienne :
Le film se veut sérieux, alors je vais essayer de l'être aussi !
Des les premières mesures le ton est donné, l'artiste voit grand, très grand, avec le requiem de Mozart. Pas besoin de réfléchir très longtemps, avec cette silhouette qui court, cette comète et cette voiture de sport, nous sommes dans le hip hop, la côte est, dans toute sa démesure. Puis l'histoire s'emballe, appuyé par une musique émouvante, empreinte des instruments cordes pour gagner en crédibilité, la nature arrive accidentellement en conflit avec la culture. Kanye West nous ouvre alors son cœur, ses émotions, ses racines, ses tripes, mais c'est en vain, la culture reprend le dessus, comme une fatalité, une dualité irréconciliable.
Ainsi l'artiste joue sur de nombreux clichés propre au genre ( la luxure, le chanteur se mettant lui même en scène, la relation amoureuse impossible, dialogues pauvres ), et de nombreux images dérangeants ( femme animale, servitude de blancs ) et se concentre sur ces dualités nature/culture, personnage/personne, classicisme/modernisme. Voulant ainsi nous dévoiler l’essence de son être, ses tiraillement intérieurs.
Mais malheureusement je n'y trouve qu'un ego surdimensionné qui embrume ces émotions, qui ne peuvent alors que sonner creux à mes oreilles. Cette démesure sentimentale purement États-Unienne.
Pourtant j'ai cru un moment, lors de cette magnifique scène où des danseuses classiques, s'adonnent avec grâce à un mélange de style ( l'arrêt sur leur position m'a particulièrement touché ), que l'homme avait trouvé son être, l'union avec la créature se fait alors presque une évidence. mais la triste grandiloquence refait surface, volant un baiser sentimental, pas total, superficiel.
A vrai dire, je suis confus à la fin de ce commentaire, car je voulais faire une critique d'un mauvais film hollywoodien. Finalement je me rends compte que tout l’intérêt de ces 34 minutes se tient entre la minute 14 et 24, dans ce ballet sentimental, cette parade amoureuse, presque charnelle ( beaucoup plus que la scène d'amour d'ailleurs ) et que toute l'aversion que j'ai pour le reste du film, cette introduction de mauvais goût, cette histoire bateau que tous les rappeurs ont déjà tous traité un jour de pluie, ne sont là que pour sublimer son cœur.
Toute cette histoire, cette ange tombé du ciel, c'est la culture, et l'art dans tout ce qu'il véhicule est la nature, la seule chose réelle.
Pour conclure je dirais donc, que comme Kanye je suis tiraillé, et ne sais vraiment pas quoi penser de ce film et vous laisse faire votre propre avis
( je n'ai pas parlé de la musique mais elle est secondaire à mon sens, c'est le pigment de ce tableau. Tous les morceaux ne me plaisent pas, surtout ceux plus RnB, mais certains sont très bon et cela m'a donné envie d'écouter l'album sous un nouveau jour ).
THE WEAR DON'T MAKE THE MONK! / Pochette hideuse mais disque génial.
Le choix d’Alexandre :
MGMT -
CONGRATULATIONS (2010)
Je dois avouer que, si la pochette est d’un mauvais goût indiscutable, j’ai
fini (après une période de rejet) à l’apprécier. Et oui. Car la musique qui se
cache derrière est de celles qui comptent énormément pour moi.
Au moins cette pochette cartoonesque nous renseigne bien sur une ou deux
choses : l’aspect psyché de la musique d’abord, et surtout le fait qu’on a
là l’album d’un groupe qui qui ne se prend pas au sérieux (le graphisme, mais
aussi la symbolique du groupe qui essaie d’échapper à la vague de la hype, ou
son interprétation contraire qui me paraît la plus juste : MGMT n’en a
rien à faire de tout ce cirque et saborde sa bankabilité. L’ambition et la
qualité de cet album balaient telle une grande vague tout ce que l’industrie a
voulu leur imposer : strass, surexploitation en tant que poules aux œufs d’or
de l’électro-pop, people-isation. Ne reste que la musique.)
Je l’ai usé jusqu’à la corde celui-ci. Un enchaînement de pop-songs parfaites,
d’une perfection formelle absolue, et inventives en plus de ça. On a là des
chansons à tiroirs, dont on n’a jamais fait le tour. MGMT est ici toujours en
train de chercher, avec un esprit qui ne tombe jamais dans le passéisme, malgré
des références évidentes, mais maîtrisées. L’album est l’œuvre un groupe d’une
ambition folle, mais qui en a les moyens.
On passe de l’euphorie (It’s Working,…), à la mélancolie (Someone’s
Missing, I Found A Whistle, Siberian Breaks,…), à la folie (Song For Dan Treacy
, Flash Delirium, Brian Eno,…), et souvent les trois (et plus encore) à la
fois, et dans le même morceau. En plus de ça, le groupe a des choses à dire.
Les textes sont copieux et souvent très réussis dans différents genres :
cf. l’ « hilarante – touchante - tout ce que vous voulez » Brian
Eno.
Vous l’aurez compris, ce disque est très important pour moi, et j’aurais
de toutes façons trouvé une excuse pour en parler assez vite, en attendant que
j’en fasse une chronique plus complète. A mon humble avis, quand on regardera
en arrière, dans quelques temps, il sera à juste titre considéré comme un des
tous meilleurs albums des années 2010.
Oh et pour les plus réticents d'entre vous : Sonic Boom des Spacemen 3 et Dave Fridmann (Mercury Rev, producteur des Flaming Lips, de Tame Impala, ...) ont produit l'album.
Le Richard D. James Albumd’ Aphex Twin est une créature visuel
hideuse, avec le portrait diabolique de son auteur pour couverture, et des
agglomérations organiques non identifiées à l'arrière. Pourtant cet album
d'anthologie est un monstre de poésie et reste une référence dans le monde
électro.
ETIENNE
(L’avis d’Alex : Excellent
album, un classique ! Le bonhomme est un génie, mais ses pochettes sont (à
dessein) des perles de mauvais goût et de laideur, pour certaines en tous cas. Etienne a
fait soft, matez moi la pochette de Widowlicker par exemple, vous verrez, c'est bien pire.)
Ecoutez-moi ça ensuite (c’est
beau ça par contre) :