Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

mercredi 28 février 2018

Rejjie Snow - Dear Annie (2018)


  J'avais acclamé le dernier album du rappeur irlandais Rejjie Snow, The Moon & You, dans mon top de fin d'année 2017. D'ailleurs cet album avait davantage en commun avec la pop expérimentale dopée au rnb et ouverte au rock indé, au folk, à la soul, au funk et à l'électronique du Blonde de Frank Ocean qu'avec du hip-hop puriste. Avec son dernier album, il fait encore plus fort avec deux principales influences en tête : l'électro-pop française et Tyler The Creator (auteur de mon album préféré de 2017 et collaborateur de Frank Ocean justement). 

  En effet, après la très belle jazz-pop synthétique teintée de gospel de l'introduction quasi-instrumentale "Hello", on tombe directement sur "Rainbows", chanson pop produite par le français Lewis Ofman, dans lequel sa collaboratrice et partenaire Milena Leblanc contribue à quelques choeurs, et où Rejjie Snow dévoile un flow grave, posé et assuré à la diction proche de celle de Tyler. Un bel exemple du mélange étonnant de ces deux influences pourtant très compatibles (surtout avec le virage progressif de Tyler, The Creator vers un électrofunk doux à la fois pop, soul et rnb, qu'on retrouve sur "Room 27", toujours produite par Ofman). 

Rejjie Snow, Lewis Ofman & Milena Leblanc - Rainbows (2018)

  Le duo Ofman/Leblanc est aussi aux manettes de "Mon Amour", belle chanson électropop typique du style du français dans lequel le rappeur est accompagné des choeurs en français du couple, avec même un couplet très Birkin de Milena. Lewis Ofman nous avait confié lors de notre interview que les disques de Gainsbourg pour et avec Jane étaient ses modèles absolus de collections de chansons pop parfaites, et c'est vraiment surprenant et génial qu'il ait assouvi son envie de les égaler sur un album de Rejjie Snow, c'est pourtant ce qu'il se passe sur la géniale "Désolé", dans lequel ce dernier s'essaie même au français. Mais c'est également logique puisqu'il nous a affirmé mourir d'envie de bosser avec Frank Ocean, avec lequel Snow possède une vraie connivence musicale. Cela permet également au producteur français de se mettre en danger en allant chercher des styles musicaux différents de ce qu'il a déjà fait comme sur la pop mutante de "Bye Polar"

  Ces allusions françaises servent le thème de l'album qui se veut romantique, la France étant le pays représentant le mieux l'amour selon l'irlandais. Je n'arrive en revanche pas à savoir si la sympathique et fun "LMFAO", elle aussi teintée de France, est géniale façon Sébastien Tellier de Politics ou juste sympathique tout court.


  Rejjie a vraiment poli cette sortie attendue depuis longtemps, puisqu'on se rend vite compte qu'en dehors de cette collaboration structurante avec Lewis Ofman il y a une unité thématique (assurée notamment par de courts interludes mimant une interview radio) et une vraie homogénéité musicale audible dans le choix des prods et des collaborateurs (de haute volée : ex-producteurs de Kendrick Lamar comme Rahki etc...) ainsi que dans les flow et chants. Privilégiant le calme mais groovy, aéré mais richement produit, Snow reste fidèle à son hip-hop léché, chill et élégant (cf la jazzy et très cool "Oh No!" ou l'électrofunk posée de "Spaceships" avec Ebenezer). On n'a ainsi pas de mal à passer de tube en tube. de D'abord "23", chantée-rappée et magnifiée par le chant de Caroline Smith (les voix féminines sont une constante de choix de ce disque) ainsi que quelques cordes, puis la très Tyler "Pink Lemonade" et la génialissime "Egyptian Luvr" produite par Kaytranada, avec Dana Williams qui apporte énormément au morceau et Aminé. Cette dernière chanson mériterait de passer sur toutes les radios et d'être n°1 en ce moment tellement sa disco cool est bonne, dans un genre qui devrait plaire à tous, et avec une alchimie qui rappelle la grande époque des tubes radio des Neptunes et de Timbaland

Rejjie Snow, Kaytranada, Dana Williams & Aminé - Egyptian Luvr (2018)

  Même si parfois ça va un chouia trop loin comme sur la trop sucrée "Charlie Brown", rnb en partie chanté par Anna Of The North, collaboratrice de Tyler, The Creator sur son dernier album. Ou comme sur "Greatness", dont le chant rnb un peu basique est à peine rattrapé par un rap et une prod heureusement plus agressifs. Et parfois ça tourne un peu en rond, comme sur "Annie" avec le pourtant régulièrement très bon Jesse Boykins III. Ce qui est un peu dommage, c'est que ces trois morceaux, placés bout à bout en fin d'album, ternissent un peu l'écoute et la rallongent inutilement, surtout qu'il y a déjà un paquet de morceaux même en ne comptant pas les interludes. Mais rien de grave, c'est tout de même très écoutable. 

  Et malgré les nombreux styles musicaux abordés, le rap n'est pas délaissé pour autant, et des morceaux comme le bluffant diamant brut "The Ends", ou la jazzy "The Rain", font habilement le lien entre le boom-bap old-school et la foisonnante modernité du genre.


  C'est donc un album réellement passionnant, très réussi, que Rejjie Snow le perfectionniste a pris soin de polir pendant de longues années quitte à se coltiner une réputation de branleur. Un superbe disque que je vous recommande absolument.


Alex


lundi 26 février 2018

Burnt Ones - Last Draft in Different Rooms (2018)


  Burnt Ones est un super groupe constitué autour d'habitués du label Medium Sound : Landon Caldwell et Mark Tester (aka mes chouchou les Creeping Pink), leur bassiste et graphiste Brian Allen et Amy Crouch. Et si vous avez suivi mes articles sur ce petit groupe de musiciens, vous savez qu'ils ont une prédilection pour mixer de l'électro-pop travaillée, toute en textures, à la Brian Eno, avec un rock psychédélique volontiers bruitiste et de l'ambient lo-fi.

  Par exemple, "Obstacle Illusion" sonne comme une mix indé entre le Bowie de Low et Animal Collective, c'est donc une excellentissime chanson, à la fois relativement accessible et belle et aventureuse (ces sons, cette répétition quasi krautrock, ce rythme haché...). C'est parfois dans la construction du morceau que se cache la complexité, ou du moins l'inattendu : "Through Coarse Window" alterne entre électronique contemplative et rock psyché quasi garage aux accents post-punk, pour finir par une plage électro-pop minimaliste absolument ravissante. Parfois, comme sur "Good Omen (Tower)", la composition se fait plus pop, le mix plus clair, et on entrevoit tout le génie de ce petit groupe d'illuminés dont la musique ne mérite pas d'être si confidentielle.

  Ce côté garage-psyché, on le retrouve sous son versant électro-rock sur "Cascades", elle aussi plus directe et rappelant les travaux (eux aussi très versés sur les Silver Apples et Brian Eno) de John Dwyer de Thee Oh Sees sous son alias Damaged Bug, et se marie à merveille avec des influences minimalistes (comment ne pas penser à Terry Riley sur ce morceau ainsi que sur "Easy Ending", également très Eno ?). Les chansons plus accessibles ne sont vraiment pas si rares que ça, puisque la lumineuse et presque folk "New Passageways" pourrait plaire au delà du cercle des amateurs de Creeping Pink. Le chant y est pour beaucoup, la construction des morceaux aussi, comme on l'a déjà dit.

  Un autre sommet de cet album est l'enchaînement électro-rock "Love Light"/"Lost Altar"/"Shifts", noir et obsédant comme du Suicide trempé dans du Silver Apples, mais revu avec les sons d'Another Green World, du meilleur du psyché obscur des 60's, et des techniques de production électroniques plus modernes. Brillant. Plus loin, c'est "Room With A View" qui marie les influences du groupe d'Alan Vega et Martin Rev avec le folk de Bon Iver, des synthés exotiques et un chant de crooner post-punk. Avec le même genre de voix, "See You" ferait presque du Tindersticks version lo-fi, ou en tous cas un excellent mix de pop synthétique et de folk brumeux.

  Les intermèdes quasi ambient, ou disons plus expérimentaux et électroniques, comme "Hello Loop", "Tone For A Hole In The Ground", "Room Regroups (Vacation Levels)", "Dream Of Sleep" ont un rôle crucial dans l'établissement d'un rythme au sein de cet album, étirant le temps entre deux morceaux en étant au choix contemplatifs, spirituels ou émouvants, et nous faisant partager la vie du studio via des extraits audio de conversations, et même d'une partie de ping pong si j'ai bien entendu. 

  Cet album est une confirmation : tous ces gens sont extrêmement talentueux, et une surprise : ils peuvent peut-être convaincre plus largement grâce à des morceaux un poil plus accessibles (même si leur musique, par sa nature, s'adresse plutôt à des nerds de musique comme moi qui en possèdent les codes). En tous cas, si vous voulez un disque de pop aventureuse, moderne, authentique, pleine de talent et d'amour, faites moi le plaisir d'écouter cette petite oeuvre d'art.


Alex


samedi 24 février 2018

Franz Ferdinand - Always Ascending (2018)


  Lorsqu'un groupe perd un guitariste et co-compositeur, il arrive régulièrement ce qui est arrivé à Franz Ferdinand sur cet album : il ajoute des synthés. D'un autre côté, ceux-ci étaient au premier plan sur Tonight (2009), qui est probablement leur meilleur album, et étaient resté bien présents sur Right Thoughts Right Words Right Action (2013). Si vous ajoutez un peu de théâtralité glam rock davantage appuyée depuis leur collaboration avec les géniaux Sparks sur l'album commun FFS (2015), vous arriverez logiquement à la conclusion qu'Always Ascending sera leur album disco/synthpop, et vous n'aurez pas tout à fait tort. Rien que la pop song new wave post-Buggles (rappelant également l'influence de Blondie sur les FF) "Lois Lane", ou bien le piano disco-house de "Glimpse Of Love" vous donneraient raison. Et vous indiqueraient que le virage est réussi. Mais si vous écoutez attentivement, vous y entendrez bien plus qu'un simple virage électro-pop.

Franz Ferdinand - Always Ascending (Clip, 2017)

  Et c'est également vrai dès la chanson-titre, qui ouvre le bal. Montées de synthé, guitares cocottes funky, tout est réuni pour en faire un hybride entre Donna Summer et LCD Soundsystem, avec ceci dit un côté très anglais (cf également l'album homonyme de 2014 du groupe The Sunshine Underground si vous ne voyez pas ce que je veux dire). Cependant, une certaine noirceur point, notamment via le chant d'Alex Kapranos, volontairement plus fragile et moins assuré qu'à l'accoutumée (c'est vrai tout au long du disque), ce qui ajoute une tension supplémentaire et compense le côté dansant. On pense au dernier Nick Cave, lui aussi reposant sur beaucoup de premières prises imparfaites mais urgentes pour un résultat prenant, dans un contexte plus tragique.

Franz Ferdinand - Lazy Boy (2018)

  Sur "Lazy Boy", cette voix fatiguée, oscillant entre rage et lassitude, fait le sel d'un morceau sombre, entre dub de Tonight et post-punk insistant et noir du premier album. Meilleur morceau de l'album, de loin, c'est une réussite totale qui s'inscrit immédiatement parmi les meilleurs du groupe. "Finally" est un bon morceau là encore un peu marqué par le dub, avec un rythme syncopé et une prod inhabituellement lo-fi pour le groupe (audible sur quasi tout le disque, avec saturation, sifflements et mastering inhabituel), qui redonne avec le chant plus spontané de Kapranos une urgence nouvelle au groupe. Ce retour à la spontanéité s'avère salvateur pour Franz Ferdinand en termes d'énergie, et est une direction plutôt inhabituelle pour un groupe de cette carrure avec une telle carrière. Une preuve de plus de leur intelligence musicale. Encore avec un gros côté sombre et sexuel propre à l'album de 2009, "Feel The Love Go" égale presque "Lazy Boy" dans son excellence, dans une veine plus disco-punk, avec là encore une urgence renouvelée par un synthé abrasif et un chant punk quasi-faux sur le crescendo final. Génial.

Franz Ferdinand - Feel The Love Go (Clip, 2018)

  On retrouve le songwriting pop classique du groupe, désinhibé par l'expérience FFS, sur "Paper Cages", dont les arrangements à base de synthés pétaradants, de piano virevoletant et de guitares appuyées sont sompteux. "The Academy Award" est quasiment un morceau folk avec quelques montées glam, là encore à la prod pas dégrossie et au mixage délicieusement approximatif appuyant magnifiquement l'ironie et l'écriture mordante du titre. L'exploration du glam malicieux se poursuit sur "Huck And Jim", entre saturations, basse post-punk et pop d'opérette. Et "Slow Don't Kill Me Slow" termine l'album sur une note décadente façon Beatles sous drogue, entre choeurs divins, synthés déviants presque psyché et piano triste. 

  Là on on se serait attendus à un album propret de disco-rock synthétique, les Franz Ferdinand se sont en fait appliqués à faire ressortir leur rage adolescente audible dans une production plus lo-fi et un mix plus sauvage que sur n'importe lequel de leurs albums, mettant en valeur le chant urgent et fatigué de Kapranos et les montées musicales épiques du groupe. Un album bien plus sombre, intéressant et vital que ce qu'on pouvait espérer, et une nouvelle raison de confirmer tout le bien que je pense de ces écossais géniaux. Merci les gars de ne jamais décevoir.

Ecouter sur Spotify et sur Deezer

Alex

  

jeudi 22 février 2018

Montero - Performer (2018)


  Dans l'ombre de Mac DeMarco, Montero nous avait déjà offert de superbes chansons pop, mais le graphiste de formation vient de monter d'un cran dans mon petit panthéon personnel avec ce magnifique album nommé Performer et sorti cette année. 

  On a affaire à de la pop de haut vol, avec un feeling "classique" presque beatlesien pervertit par des effets psyché et une voix haut perchée comme chez Mercury Rev et des suites d'accords inhabituelles à la Mac DeMarco, comme sur "Montero Airlines". Sur "Aloha", ce sont des sons de synthé et des accords à la Sébastien Tellier qui, posés sur un beat énorme à la Phil Collins 80's, appuient une mélodie vocale tantôt martiale pendant les couplets et délicate pendant les refrains (où elle peut rappeler Empire Of The Sun). Tandis que "Pilot" se la joue néo-Motown et que "Caught Up In My Own World" évoque le meilleur de la sunshine pop 60's revue au travers un prisme soul/funk et trempée dans le psychédélisme. Ce côté post-MGMT est également très présent sur l'électro-rock de "Performer", qui flirte avec le too much. D'ailleurs, parfois, la prod pourra sembler trop chargée à certains, mais pour moi c'est pile ce qu'il faut avant la surdose (dans le genre, la très cheesy "Destiny" dépasse peut-être un peu ma limite en versant dans le hard FM).  

Montero - Running Race (Clip, 2018)

  Mais sur les morceaux les plus aérés, ça fait mouche. Par exemple, on pense à une version plus directe, plus tube des années 80 revisités façon M83, de Mercury Rev, sur la très mémorable "Running Race"

Montero - Vibrations (Clip, 2018)

  "Vibrations" réussit à réunir ces deux influences et à les ajouter à une pop psyché théâtrale, glam et grandiose devant beaucoup à Pond et au folk-rock un peu prog des 70's. Plus loin, "Quantify", synthpop déglinguées façon John Maus, convainc un peu moins mais reste agréable. C'est le mentor DeMarco et Michael Jackson qui sont évoqué sur l'également très psyché "Tokin' The Night Away".

Montero - Tokin' The Night Away (Clip, 2018)

  Au final, un très bon album, très solide, très fun, riche et bien foutu. Derrière des aspects "marrants", c'est belle et bien une ambition folle qui a guidé ce projet du début à la fin. Cette tambouille psyché/pop/rock/glam/soul/funk/électronique est un des exemples les plus jouissifs dans le genre depuis le dernier Cullen Omori, et c'est un vrai gros compliment. 

Ecouter sur Spotify ou Deezer

Merci à Vincent de "la musique à papa" de m'avoir fait découvrir ce disque via cet article, que je vous encourage à lire

Alex


mardi 20 février 2018

Ravyn Lenae - Crush EP (2018)


  Ca fait déjà quelques mois (années ?) que je suis avec attention la jeune américaine, auteure ou collaboratrice de certaines excellentes chansons pop et rnb, notamment sur son EP Moon Shoes (2016). Et grâce à cet EP nommé Crush et sorti cette année, Ravyn Lenae vient de franchir un cap de plus dans mon estime.

  Dès "Sticky", elle déploie une pop riche d'influences diverses. De la synthpop, une production résolument hip-hop chaude avec une oreille aiguisée pour les gimmicks pop inoubliables comme les prods de Timbaland pour Aaliyah (la pochette de "Sticky" est d'ailleurs un clin d'oeil à celle de son album de 2001, cf ci-dessous), et puis la lointaine parenté avec le funk liquide, sensuel et intelligent de la famille Soulquarians (D'Angelo, Questlove, Erykah Badu...). Elle emprunte d'ailleurs à cette dernière un petit grain de folie vocale qu'on retrouve habituellement plutôt dans le post-punk des années 80 (Blondie, Talking Heads, Devo, Nina Hagen, B-52's...). 

Ravyn Lenae - Sticky (pochette du single, 2017)

Aaliyah - Aaliyah (pochette de l'album, 2001)

  "Closer (Ode 2 U)" continue sur la même lancée, son funk psychédélique et aquatique conviant aussi bien Prince, George Clinton, Bootsy Collins, Sly Stone, Childish Gambino, Kelela les soeurs Knowles (Beyoncé et Solange), que Janelle Monaé ou Outkast. Une merveilleuse chanson.

  On pense aussi à l'approche commune avec le groupe The Internet (notamment Matt Martians et Syd), mais c'est le guitariste Steve Lacy (dont on vous a déjà pas mal parlé sur ce blog), collaborateur de Kendrick Lamar et auteur d'un des meilleurs EP de l'an dernier (Steve Lacy's Demo), qui produit l'EP et chante même sur les excellents "Computer Luv" et "4 Leaf Clover" (proche du travail d'AK Paul avec Nao ainsi que de celui du Miguel de Wildheart (2015)). 

  Reste à évoquer la princière et très Chic "The Night Song", magnifique ballade funky aussi légère que groovy, au chant absolument divin de Lenae façon Minnie Riperton.

Ravyn Lenae - Sticky (Clip, 2018)

  Cet EP est un vrai bonheur, entre rnb angélique, pop sucrée, funk groovy, et psychédélisme aquatique, rempli uniquement de bonnes chansons à l'interprétation plus que convaincante et au son impeccablement produit, entre hommages aux grands du passé et modernité. 

A écouter absolument sur Spotify ou Deezer par exemple.

Alex


dimanche 18 février 2018

MGMT - Little Dark Age (2018)


   Fun et sophistiqué, c'est la description qui colle le mieux à cet album. Fun, dès le premier morceau, synthpop entre Buggles, Yellow Magic Orchestra et psyché fun et électronique façon Flaming Lips période Yoshimi sur "She Works Out too Much". La voix de Cellars embellit ce morceau à la ligne de synthé-basse bondissante et japonisante dans son alliance de complexité jazz et de vitesse mécanique irréaliste façon jeux vidéo. Sophistiqué, sur le même morceau, car les nombreuses couches de clavier, les effets, le beat se percutent avec une grâce certaine et un sens du groove indéniable. Le mille-feuille rappelant presque le jazz fun, basé sur la basse, volontiers électronique et japonisant de Thundercat, surtout en fin de morceau lorsqu'un saxo mi-free mi-kitsch 80's s'invite sur la piste. 

MGMT - Little Dark Age (2017)

  On connaissait déjà les excellents singles "Little Dark Age", tube de synthpop gothique triste et euphorisant à la fois au lignes de syntéh inoubliables et au refrain libérateur, l'également très bon trip pop-folk psychédélique de "When You Die", réalisé avec l'aide d'Ariel Pink dont l'influence plane sur ce disque avec ce subtil alliage de second et de premier degré dans le traitement de musiques accessibles (pop 80's) et plus confidentielles (psychédélisme 60's). Et puis "Hand It Over", dont on vous a parlé dans le bilan de nos morceaux préférés de janvier, très jolie capsule temporelle nous renvoyant tout droit à l'époque de Congratulations (2010) et petit classique instantané très émouvant.  

MGMT - When You Die (2017)

  Et puis on a découvert le très bon "Me And Michael" juste avant la sortie du disque, réminiscence des sous-estimés rois de la pop 80's la plus flamboyante et dark à la fois, j'ai nommé les Pet Shop Boys. Mais ce single arrive à transcender sans problème son statut de pastiche en se payant le luxe d'être complètement hors du temps grâce à une mélodie inoubliable et un juste dosage des arrangements. 

MGMT - Me And Michael (2018)

  Il nous restait donc à découvrir la seconde partie du disque, qui se permet d'être plus expérimentale après ce déluge de singles. Et c'est "TSLAMP" pour "time spent looking at my phone" qui oscille entre Daft Punk, reggae/dub et musique synthétique post-80's inspirée par l'Afrique (Sébastien Tellier période Politics, Toto période "Africa", Paul Simon, etc...). Un bon petit morceau bien funky. Le côté dub est également bien exploité sur "Days That Got Away", avec là encore un traitement des filtres riche faisant sonner les synthés comme sur le Discovery des Daft, avec une touche psyché en plus et un petit côté africain (on ne serait pas étonné d'apprendre que le groupe a beaucoup écouté le génial Mammane Sani, king du synthé du Niger), et des voix proche de ce qu'on pourrait attendre de Bee Gees période disco sous champis. En parlant de ça, sur la grandiose "When You're Small" c'est le côté psyché qui prend le dessus, avec un retour aux influences premières du groupe : Flaming Lips, Syd Barrett, Dan Treacy, Beatles, Sagittarius, The United States Of America

  En revanche, on revient à la synthpop sous influence Ariel Pink avec "James", dont le traitement du chant rappelle Pink mais aussi les suiveurs d'Empire Of The Sun et dont la prod agréablement chill aux accents jazzy et psyché ravit. Equivalent slow de "Me And Michael", c'est une vraie réussite. 
  Sur "One Thing Left To Try", le déluge de synthés est également de retour, mais de façon plus théâtrale et baroque, quasi glam, entre Sébastien Tellier, Electric Light Orchestra, Empire Of The Sun, Niki & The Dove et Currents de Tame Impala.

  En bref, cet album est une sacré réussite, un gros kiff pour le fan absolu du groupe que je suis, mais qui pourrait également plaire à un grand nombre tant ces morceaux sont beaux et accessibles pour la plupart. 
A écouter absolument (sur Spotify ou Deezer).

Alex


vendredi 16 février 2018

Sidney Gish - No Dogs Allowed (2018)


  De la pop aussi funky, maline et ouverte qu'un David Byrne, aussi rock et malicieuse qu'une Courtney Barnett et avec un feeling jazz, ça avait tout pour me plaire. Et c'est ce qu'on entend dès les premières mesures de "Bird Tutorial", avec même un sample d'un tuto pour "apprendre à son perroquet à parler". Et ce n'est que l'intro du très très bon album de Sidney Gish, musicienne américaine venant de la guitare jazz, qui a eu la riche idée de se mettre à la pop. Ces influences jazz se ressentent dans les accords riches et l'élégance de l'écriture, du jeu et du chant de "Sin Triangle", et lorsque comme ici c'est mixé avec le côté authentique et bricoleur d'une pop-rock indé lo-fi, c'est vraiment désarmant de charme. Et puis il y a toujours ce côté presque second degré via ces samples de voix type "radio des années 50", mais également du gros fun au premier degré intégrées dans la composition, notamment avec ces petites pauses suivies d'une reprise exagérément puissante. Ces petites accentuations d'intensité ponctuent à merveille la musique et offrent respirations et rythme à la chanson, achevant d'en faire un petit classique instantané obsédant. 

Sidney Gish - Sin Triangle (Live, 2018)

  La mise en son varie également pas mal, entre folk-rock tranquille sur "Good Magicians" aux acrobaties de guitare virtuoses et mélodiques rappelant aussi bien le meilleur des années 60-70 (Beatles, Byrds) que les rockeurs déglingués des 90's (Beck, Pavement). Plus loin, c'est une synthpop au beat funky couplée à un jazz d'ambiance un poil tropical qui épicent "Sophisticated Spaces", autre excellent titre. Le côté funky et détaché est également le point fort de "Not but For You, Bunny" et "I Eat Salads", absolument irrésistible avec son beat électro et ses chœurs glam quasi Queen lorsque Freddie Mercury était d'humeur joueuse.

  Et puis sur certaines chansons comme "I'm Filled With Steak, and Cannot Dance", on est obligés d'abandonner toute idée de genre musicale tant les éléments qui la composent (synthés, guitares glam, percus disco, basse minimaliste...) n'ont en théorie rien à voir ensemble alors qu'ici ils se complètent plus qu'à merveille. 

Sidney Gish - I'm Filled With Steak, And Cannot Dance (2018)

  Même les morceaux moins marquants, comme la pop post-90's minimaliste de "Mouth Log", le rock indé de "Impostor Syndrome" à la suite d'accords très intéressante ou "Where The Sidewalk Ends" avec un petit côté twee pop façon Frankie Cosmos (qu'elle a d'ailleurs reprise) ou I'm From Barcelona, sont suffisamment attachants pour qu'on y revienne. Et parfois, c'est avec la simplicité pour meilleure alliée que Gish touche le plus, comme sur "Rat of the City", fragile petit miracle pop, ou sur "Persephone" rappelant le Bon Iver du 2e album. On a d'ailleurs l'impression qu'elle nous joue son album en direct sur Skype, rien que pour nous, à l'écoute de la désarmante pop pleine de blues de "New Recording 180 (New Year's Eve)" qui pourrait humidifier les yeux du plus insensible d'entre nous.

Sidney Gish - Persephone (Live, 2018)

  En bref, c'est un disque fun, intelligent, personnel, authentique et maîtrisé à la fois, qui arrive à marier le charmant, le drôle et l'anguleux, et c'est tellement rare que ce soit aussi réussi qu'ici que je ne peux ajouter qu'une seule chose : foncez l'écouter !

Ecouter sur Bandcamp ou sur Spotify ou sur Deezer ou sur youtube

  Et si vous avez apprécié, allez faire un tour sur sa chaîne Youtube ou elle reprend (très bien) des tas de chansons cool, comme par exemple "Salad Days" de Mac DeMarco.

  Et pour convaincre Etienne, elle a même repris tes chouchous Vulfpeck poto, alors tu dois l'écouter.

Alex

mercredi 14 février 2018

Wildflower - Wildflower (2017)


  Wildflower est un trio de jazz anglais formé par Idris Rahman (saxophone, flûtes), Leon Brichard (basse, contrebasse), et Tom Skinner (batterie). Sur cet album, Wildflower, sorti en 2017, le groupe délivre free jazz organique, aéré et spirituel, inspiré selon leurs propres dires par Pharoah Sanders, Alice Coltrane, Yusef Lateef et Sun Ra ainsi que par le jazz modal et diverses musiques traditionnelles asiatiques et africaines (Gnawa, Bengali folk).

  Ma petite préférée, "Flute Song" ouvre le bal. Un morceau aéré, délié, au beat espacé allant crescendo en intensité, à la basse insistante mais souple, et à la flûte obsédante, jouant avec les gammes de l'Asie et de l'Afrique de la plus belle des manières. Une belle illustration du côté cosmique et spirituel qui guide leur musique. Rahman retrouve  son saxophone sur "Where The Earth Meets The Sky", avec une structure équivalente : tandis qu'il égrène ses mélodies célestes et leurs variations free, la batterie marque le beat en s'autorisant quelques fantaisies tandis que la basse garde le cap. 


  De façon intéressante, "Long Way Home" est plus agressive, plus sauvage, plus rythmée, presque jazz-rock, teintée de blues et de psychédélisme sombre. Et au final, très intense. Encore un excellent morceau. Le rythme redescend un peu, mais pas la tension, sur l’intrigante, menaçante et mystérieuse "Other Worlds", dont les explorations sonores divaguent entre jazz New-Yorkais, John Coltrane période Sun Ship et musiques du Moyen-Orient. C'est donc avec étonnement que l'on accueille le morceau suivant, "Hogol", au beat africain et à la mélodie quelque part entre Fela Kuti, Duke Elligton et l'afro-pop des 70's-80's (William Onyeabor, Francis Bebey) qui a inspiré tout un pan de l'art-rock américain et européen contemporains (Talking Heads, Tom Tom Club...). Avec bien sûr, de pertinentes sorties de routes free magnifiquement appuyées par un groove syncopé. L'alchimie et la virtuosité du saxo et de la batterie sont vraiment le gros, gros point fort de ce merveilleux morceau, qui reste accessible malgré sa complexité grâce à l'oreille affûtée des musiciens.

  Une belle reprise de l'intro sur la très pure "Flute Song (Outro)", et nous voilà déjà sortis de ce voyage prenant mais bien trop court. Vous aurez compris que je tiens ce disque en très haute estime, et si je suis déçu de ne pas être tombé dessus à sa sortie l'an dernier, je suis heureux d'avoir fini par l'écouter et je ne peux que vous encourager à faire de même, car c'est vraiment un grand disque de jazz et un grand disque tout court.

lundi 12 février 2018

Swing - Marabout (2018)



  Marabout, album du rappeur belge Swing, sorti en Janvier 2018, commence comme du Krisy sur "Richesse", avec ce flow doux et délié influencé par MC Solaar et Doc Gynéco, mais en bien plus moderne, et une prod cotonneuse avec des accents quasiment Air période Moon Safari (très audible dans les effets sonores). Y'a un petit côté 1995 dans le texte et le flow également, cette relecture moderne d'un âge d'or du rap des années 90, et cette faim de reconnaissance couplée à une intégrité totale marquant son côté indépendant, "hors du système" comme il le dit lui-même. Sur "Corbeaux", on est presque dans la chanson française, on entend la magnifique voix profonde et assurée de Swing sur ce morceau davantage chanté basé sur un alliage beat-piano-synthés de haute volée. Ce diptyque inaugural de chansons est le truc le plus intriguant entendu dans le rap francophone depuis Ipséité de Damso. "Rivage", avec Le Motel, tape également quasiment dans la chanson française, avec une tonalité chill vraiment très agréable.

Swing - Corbeaux (2018)

 Et ça continue comme ça pendant tout l'album, avec des productions impériales, hyper musicales, des paroles ultra bien écrites et des flows élastiques. Ça bouge bien sur "Cours de Danse" et sur le très bon "Canopée" avec une instru vraiment très riche et originale, ça s'approche d'un mix folk/soul/rnb sur "Mama" en duo avec Blu Samu, ainsi que sur le très doux "Interlude" et ses petites touches jazzy. Le rnb jazzy presque nu-soul est également le point fort de l'"Outro"Swing ose même le morceau néo-90's avec l'excellentissime "Planer" absolument parfait dans son genre. Et réussit le même exploit, en un peu plus modernisé encore sur "Cercle", également vraiment bonne.

Swing - Cercle (2018)

  Bref, superbe album rempli de flows habiles, de productions impeccables entre classiques et sons contemporains, et de textes ciselés. La plus grande claque de rap francophone depuis Damso et Krisy, et une preuve de plus de l'immense vivier de talents que comporte la scène belge.

samedi 10 février 2018

Shopping - The Official Body (2018)


  The Official Body est le 3e album du groupe anglo-écossais Shopping, sorti en janvier 2018 sur le label Fat Cat Records. Et c'est vraiment un putain de bon album. Il faut aimer le post-punk par contre. Les grooves discoïdes à la Talking Heads, la folie des voix des B-52's, la grosse basse de Gang Of Four et les guitares tranchantes de Television. Car vous avez tout ça rien que sur "The Hype". Du punk qui groove et qui bondit, accompagné de quelques synthés et de lignes vocales accrocheuses, c'est également ce qui vous attend sur "Wild Child"

Shopping - Wild Child (2018)

  Chaque son, chaque note, chaque mot est pile là où il faut, rien ne dépasse, on attend des sommets de concision qui m'évoquent la géniale Sneaks. Tout ici est placé pour être efficace, rien ne dépasse, et pourtant c'est bien une énergie folle qui dirige des titres comme "Asking For A Friend", avec ce mélange de sérieux nihiliste et de second degré fun quasiment hédoniste caractéristique du post-punk. Comme une dernière fête débridée avant la fin du monde. Sur cette dernière chanson, tout comme sur "Suddenly Gone", ce sont les guitares qui portent le morceau. Véloces, acérées, à la fois virtuoses et acides, elles ont ce son mi-obsessionnel mi-débile, allégorie de l'aliénation par excellence, elles rappelleraient presque en ce sens l'utilisation des guitares pour le même effet dans le générique de South Park. Et c'est encore plus vrai sur l'encore plus maniaque "Control Yourself". C'est pareil pour "Shave Your Head", avec un petit côté décadent, californien, en plus, rappelant côté séries l'ambiance de Californication, et côté musique le punk mixte génial des X.

Shopping - The Hype (2018)

  Pour illustrer ce côté décadent, ainsi que l'aspect "hédonisme nihiliste", "Discover" est l'exemple qu'il vous faut : un synthé basse baveux et saturé, des guitares punk-funk tranchantes, un beat imposant et des chants de weirdos magnifiques. Un peu Brazilian Girls (groupe bien trop sous-estimé) dans l'esprit. Vous prenez tout ça, vous l'exagérez avec des échos dub et un synthé acid house, et vous avez "New Values", autre géniale pop song.

  Le ton s'allège, se retrouve plus proche du punk sur "My Dads A Cancer", avec là encore une guitare rapide, mais plus douce qu'à l'habitude, avec ce côté punk des années 80, un peu Stray Cats, un peu Cure des débuts, un peu B-52's. De même, la conclusion, "Overtime", est un poil plus légère même si toujours aussi délicieusement moqueuse, et joue avec les influences afropop de William Onyeabor venant des Talking Heads, avec un synthé malicieux et une basse groovy.

  En bref, c'est vraiment un superbe album, celui qui de loin m'aura le plus marqué en janvier avec le Profligate, et que je réécoute frénétiquement avec un plaisir renouvelé. Je vous en recommande donc plus que chaudement l'écoute !


Alex


  

jeudi 8 février 2018

Ghostface Killah - 12 Reasons To Die (2013, avec Adrian Younge) & The Brown Tape (2013, avec Apollo Brown)

Ghostface Killah & Adrian Younge - 12 Reasons To Die (2013)

  12 Reasons To Die (2013) est un album concept de Ghostface Killah, racontant une histoire, d'ailleurs des comics accompagnaient la sortie de l'album. Dont tous les beats ont été produits par le génial Adrian Younge, avec comme producteur exécutif le collègue du Wu-Tang Clan, RZA. Il est à juste titre considéré comme un classique du hip-hop, réunissant des prestations impeccables de Ghostface et quelques unes des plus belles prod du hip-hop grâce à Younge. 

  Celles-ci empruntent à la pop, à la soul et au rock des années 60 et 70 des samples chauds et cinématographiques, comme sur la merveilleuse "Beware Of The Stare", entre basse ronde, chœurs tragiques, piano impérial. Et que dire des cordes, de la guitare fuzz psychédélique (faisant également le sel d'"Enemies All Around", façon Ennio Morricone) et du clavecin acide débarquant en fin de morceau ? Pour tout mélomane, c'est un vrai régal. Cette musicalité débouche sur ces mélodies qu'on n'oublie pas, comme ce  dialogue guitare - piano entêtant sur "Rise Of The Black Suits", habilement soutenus par l'orgue 70's. Il y a un amour du matériau d'origine, des morceaux samplés, qui transpire autant sur "Murder Spree" que sur le classique du sampling Endtroducing de DJ Shadow.

  Le prog, la pop psyché et la soul orchestrale forment également le coeur de "I Declare War", tandis que c'est un beat à la James Brown qui structure l'édifice de "Blood On The Cobblestones". Outre la richesses des instrumentations, certains choix artistiques distinguent largement ces prods, comme le beat lent et discret de "The Center Of Attraction", servant avec beaucoup de justesse son ton dramatique et grave. D'ailleurs, ce morceau me permet de souligner la belle alchimie entre Ghostface et ses invités vocaux, ici Cappadonna, plus loin Masta Killa, Killa Sin, U-God, Inspectah Deck (énorme ping-pong vocal sur "An Unexpected Call (The Set up)"), William Hart ou mark luv. Et puis, un morceau comme "Rise Of The Ghostface Killah" sonne davantage comme un titre rock de la fin des années 60, et "Revenge Is Sweet" comme un morceau de soul psychédélique, que comme des titres de rap classiques, ajoutant à l'originalité du projet. Les prods de Younge sont tellement importantes pour l'album qu'il a droit à un quasi-instrumental, l'excellent "générique" du concept : "12 Reasons To Die", et à la présence de tous ses instrus en bonus de l'album.

  Et puis, encore une fois, Ghostface porte le projet avec une maestria rare, vocalement il est vraiment impressionnant, vous n'avez qu'à réécouter son tour de force sur "The Sure Shot" pour vous en convaincre. Bref, ce disque est un classique de la musique populaire moderne. 

  Et j'ai une bonne nouvelle pour vous, il a été sujet à une réécriture rééditée cette année, dont nous allons parler à présent.




Ghostface Killah & Apollo Brown - The Brown Tape (2013)

  En effet, c'est Apollo Brown, un de mes producteurs préférés, qui réinvente 12 Reasons To Die, en refaisant toutes les prods du chef-d'oeuvre sous le nom The Brown Tape. Ses beats célestes, ultra cinématographiques, font mouche dès le duo introductif "Beware Of The Stare"/"Rise Of The Black Suits", entre cordes irréelles, choeurs divins, craquements de vinyle, samples de films et gimmicks obsédants de guitare et de claviers. Le côté visuel de sa musique se retrouve bien sur la délicate et très classe "The Center Of Attraction".

  L'aspect vieilli, dégradé des samples et ces fameux craquements de vinyle va bien avec le côté classique intemporel de l'album, comme sur "I Declare War" où les cuivres autrefois grandiloquents et puissants semblent aujourd'hui fatigués mais gardent une trace de leur éclat d'antan. Très belle utilisation du sampling, et bel exemple de l'intelligence de Brown. C'est d'ailleurs amusant de se dire que "Rise Of The Ghostface Killah" ressemble ici presque à une version vieillie de "Still DRE" de Dr Dre

  Et même si la basse est moins présente que chez Younge (excepté sur "Enemies All Around Me"), on a presque envie de danser sur "Blood On The Cobblestones", grâce à un piano syncopé appuyé par un breakbeat efficace. La moins grande présence de basses, le plus grand recours aux samples vocaux ("Revenge Is Sweet", "Murder Spree") et à un sampling plus audible, imitant moins les orchestrations pop-rock classiques, et puisant davantage dans la musique de films ("The Sure Shot"), marquent aussi une différence significative avec l'original. Et pour revenir à l'aspect entraînant de la musique, "An Unexpected Call" est également bien funky comme il faut, on ne peut qu'osciller de la tête (au minimum) en écoutant cette tuerie. 

  En résumé, cette relecture est une réussite totale, un Everest quasiment inatteignable et qui pourtant l'a été. Un petit miracle, en somme. Impossible de dire quelle version des deux est la meilleure tant elles sont, chacune dans leur genre, absolument parfaites. Il aurait fallu également rentrer dans le détail des samples utilisés, hélas ça mériterait un article à part entière tant le sujet est vaste. Peut être une autre fois. En tous les cas, foncez écouter ces deux versions de cette oeuvre imposante et géniale.
Bonne (double) écoute !


Alex


mardi 6 février 2018

Dragon Rapide - See The Big Picture (2018)


  Le trio Dragon Rapide est un des groupes de rock indé français les plus intéressants avec -au hasard- les rennais de Kaviar Special. Signés sur le label Freemount Records, ils jouent un rock référencé mais aux influences plutôt large, chanté en anglais, et tirant régulièrement sur la pop.

  Des références, on va largement en parler ici. On entend la pop-punk des Buzzcocks ou le côté joueur du rock de Weezer ("I don't want to", "Soon A Son"). Ailleurs, c'est l'influence de la scène pop-rock indé des années 80-90  qui marque, avec des noms comme Sonic Youth ou Pixies qui viennent en tête, pour leur son et plus largement pour la construction des morceaux oscillant entre calme et électricité typique de ces groupes proto-grunge ("I don't want to", "Sucker Punch"). Et c'est la pop indé créative de Beck ou Eels avec laquelle "Astoria" ou "Spinning Top" ont un certaine parenté.

  On entendra aussi le lien entre le Bowie période glam et la britpop de Blur, via l'influence décisive du groupe Suede sur des titres glam comme "Out Of Time" et sa guitare lead marquante, la très bonne et très mélodique "Never Be The Same" ou "Soul Doctors". Le post-punk des Talking Heads, PiL ou de Television est aussi invoqué sur "Something New" et "Ugly Face", les aînés du Velvet Underground et leur héritage punk marquant quant à eux le boogie glam destroy de "Nostalgia" au pont psyché cosmique très réussi ou "Ugly Face"

Dragon Rapide - Something New (Clip, 2018)

  Plus récemment, la scène pop rock des années 2000 a aussi marqué le groupe, on entend le disco-punk de The Rapture et The Sunshine Underground (lui-même réminiscent des Gang Of Four) sur "Odyssey" et sa rythmique syncopée à la cowbell, ou le côté funky de certains Strokes et des Virgins sur "Bummed". Et pour le côté français, la puissance de "Sucker Punch" rappelle Stuck In The Sound tandis que ce sont mes chouchous les Bewitched Hands qui sont convoqués via de célestes chœurs pop ultra mélodieux sur "Astoria" ou "Never Be The Same".

Dragon Rapide - Bummed (2018)

  Mais même si ce jeu de décorticage des influences est amusant, il est loin de résumé un album finement réalisé. D'ailleurs vous aurez remarqué que certains morceaux ont été cités plusieurs fois ci-dessus, preuve d'une vraie maîtrise du groupe utilisant ces référents souvent ensemble, pour en faire autre chose, loin du pastiche. Et ils osent même des juxtapositions étonnantes, comme sur "Something New" dans laquelle ils collent un banjo donnant une coloration country-folk sur un groove funk-rock génial me rappelant les Talking Heads en début de morceau avant de virer en britpop façon Oasis

  Les morceaux sont bons, concis, le disque passe très vite sans qu'on ait le temps de rentrer dans une routine malgré son homogénéité et son intégrité, grâce à toutes ces petites variations. Le son et la production sont impeccables, ce qui ajoute au plaisir d'écoute, et les voix et les choeurs très pop contrastent agréablement avec une musique souvent assez rock, ce qui est une très bonne surprise et distingue vraiment le groupe. Et puis, le nerf de la guerre, c'est à dire les chansons, sont là, on sent un vrai savoir-faire dans le songwriting avec une successions de bonnes idées toutes bien exécutées. Et une interprétation du groupe compacte et efficace, donnant vraiment envie de les voir en live, si possible dans un pub tant qu'à faire, tant on sent ces morceaux bâtis pour la scène.


  Bref, on a vraiment affaire avec cet album à une très bonne sortie de rock français, un projet qu'on sent vraiment mûri (même l'artwork est très cool), et qui fait du bien à entendre tant le genre et la provenance géographique rendent l'entreprise délicate à aboutir et donc rare et précieuse lorsqu'elle est comme ici aussi aboutie.
Bonne écoute !


Alex


dimanche 4 février 2018

Le Bilan du mois : Janvier 2018



L'ALBUM DU MOIS :



Profligate - Somewhere Else
USA
Post-Punk/Coldwave/New Wave, Electronique, Indus, Psyché, Synthpop, Goth
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  Le duo Anthony/Kahn, très complémentaire, livre un véritable chef-d'oeuvre de pop moderne. Radical, froid, mystérieux, prenant et surtout beau, on y entend une oeuvre très personnelle, gothique, industrielle, hors du temps et absolument unique en son genre. A écouter d'urgence.
Mes morceaux préférés : Somewhere Else, A Circle Of, Enlist, Black Plate




LA CHANSON DU MOIS



Ty Segall - Rain 
USA
Glam Rock, Pop, Folk, Garage-Punk
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 Sur cette magnifique pop song, on entend la grosse influence revendiquée de John Lennon dans toute sa douceur, sa fragilité mais aussi sa furie. Ce "Rain", à la fois délicat et rageusement glam convoque également sur le refrain dissonant Lou Reed et David Bowie. Mais ce morceau est bien plus que la somme de ses influences, c'est Segall qui se livre comme jamais puis qui envoie la sauce, à la fois vulnérable et puissant, émouvant et impressionnant. Cette chanson transcendante s'impose comme un classique instantané, tant dans son écriture que dans son exécution, toutes deux du calibre des plus grands. Et elle fait partie des quelques sommets d'un album réellement excellent (voir ci-dessous).
Ecouter sur Youtube




LE CLIP DU MOIS :



Julian Casablancas & the Voidz - QYURRYUS
USA
Disco-Funk, Krautrock, Glam Rock, Synthpop
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  Cette catégorie me permet de tricher, puisque "QYURRYUS" m'a sûrement autant marquée que la chanson de Ty Segall ce mois-ci. A vrai dire, je l'ai toujours en tête en ce moment, et ce clip aussi barré que réussi me permet donc de mettre en valeur deux chansons valant carrément le détour. J'ai en effet un gros, gros coup de coeur pour ce single génial, groovy, malin, drôle, arty, débile, accrocheur et expérimental à la fois. 




L'EP DU MOIS

Shitkid - This Is It
Suède
Rock, Pop
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  Un superbe EP de pop-rock électrique, sauvage, glam, séduisant et vicieux. Un excellent projet avec de grandes chansons dedans, que demander de plus ?
Mes morceaux préférés : Yooouuu, Favourite Thing, Oh Me I'm Never, All My Fears
Ecouter sur Spotify ou Deezer





BILAN ALBUMS
***On a adoré :




Ty Segall - Freedom's Goblin
USA
Glam Rock, Pop, Grunge, Country/Folk, Garage-Punk, Hard Rock, Psyché, Jazz
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  Ty Segall nous revient avec un album généreux et créatif en roue libre, avec une énergie glam folle et des envies de voir grand, entre déflagrations punk ou hard, pop songs sensibles et folies jazz-rock. Avec, au passage, quelques-unes de ses meilleures chansons.
Mes morceaux préférés : Rain, Despoiler Of Cadaver, My Lady's On Fire, Cry Cry Cry, The Main Pretender
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Shopping - The Official Body
Royaume-Uni
Post-Punk, Rock, Pop
  Le post-punk sauvage, acéré mais également fun des british de Shopping rappelle les meilleurs (Talking Heads, B-52's, X...), se place parmi les meilleurs de son époque (OMNI, Ought...) et se pose surtout comme un de mes disques favoris de ce mois de janvier, absolument parfait et prenant de bout en bout. Génial.
Ecouter sur Spotify




Ghostface Killah & Apollo Brown - The Brown Tape
USA
Rap, Hip-Hop, Boom-Bap
  Apollo Brown est un de mes producteurs préférés, et c'est toujours un immense plaisir d'entendre ses beats célestes, alors cette réédition de sa tape de 2013 avec Ghostface Killah qui le voyait réinventer son classique 12 Reasons To Die (avec des beats d'Adrian Younge sur l'original sorti juste avant, la même année) est forcément une bonne nouvelle. La réédition du mois, sans hésiter !
Mes tracks préférées : Beware Of The Stare, Rise Of The Black Suits, Blood On the Cobblestones, An Unexpected Call, Rise Of The Ghostface Killah, The Sure Shot
Ecouter sur Spotify

Ernesto Symphonic Ensemble - INSIEME
Suisse
Baroque Pop, Electro-Pop, Funk, Jazz, Bossa-Nova, Psyché, Electronica
Lien vers notre chronique
  Le suisse Ernesto a été formé à la musique par les chorales des églises dans lesquelles son père pasteur officiait, mais également par les raves. Il a fini par inclure des influences jazz et sud-américaines dans sa musique électronique, et a composé cet album sous l'influence de Ronnie D'Addario, à qui il est dédié. D'Addario est un musicien de pop baroque dans la lignée de Brian Wilson, également connu pour être le père des deux frères de Lemon Twigs. Le résultat est un album de pop baroque absolument génial, aux accents jazz, bossa, psyché, électronique, funk... d'une richesse inouïe et d'une composition impeccable qui n'a rien à envier aux cadors de la pop sixties, avec parfois de petites touches assez françaises comme sur "Magic" rappellant Air ou "Neptune City Limits" avec un gros côté Gainsbourg et Sébatien Tellier
Mes morceaux favoris : Ermes Effron, All The Things You Are, Neptun City Limits
Ecouter sur Soundcloud




Sidney Gish - No Dogs Allowed
USA
Pop, Jazz, Folk, Funk, Rock
  De la pop aussi funky, maline et ouverte qu'un David Byrne, aussi rock et malicieuse qu'une Courtney Barnett et avec un feeling jazz, ça avait tout pour me plaire. Et ça n'a pas loupé. Un disque fun, intelligent, personnel, authentique et maîtrisé à la fois, charmant et anguleux, c'est pas si courant que ça alors foncez !
Mes morceaux préférés : Sin triangle, Sophisticated Place, I Eat Salads Now
Ecouter sur Bandcamp



Swing - Marabout
Rap francophone, Hip-Hop, Pop, Soul/Funk
Belgique
  Ca commence comme du Krisy, avec ce flow doux et délié influencé par MC Solaar et Doc Gynéco, mais en bien plus moderne, et une prod cotonneuse avec des accents quasiment Air période Moon Safari. Et ça continue comme ça pendant tout l'album, avec des productions impériales, hyper musicales, des paroles ultra bien écrites et des flows élastiques. Bref, la plus grande claque de rap francophone depuis Damso et Krisy, et une preuve de plus de l'immense vivier de talents que comporte la scène belge.
Mes tracks préférées : Richesse, Corbeau, Planer
Ecouter sur Spotify


**On a bien aimé :



Django Django - Marble Skies
Electro-Pop, Synthpop Rock, Psychédélisme
Royaume-Uni
Lien vers notre chronique
  Les attachant Django Django, un des groupes fétiches de la vague néo-psychédélique des années 2010, nous offrent un disque fidèle à eux-mêmes avec un parfum 80's encore plus prononcé, et qui s'avère aussi délicieux que consistant, avec quelques perles très appréciables. C'est donc un troisième album réussi !
Mes tracks préférées : Sundials, Marble Skies




Helado Negro - Island Universe Story 4
USA
Pop, Soul, Funk, Electronique, Rock
  J'adore Helado Negro (particulièrement son album de 2016, Private Energyque j'avais chroniqué ici), et j'ai été particulièrement heureux de tomber sur une nouvelle sortie de l'artiste. Cette fois, c'est le volume 4 de la série "Island Universe Story", suite d'EPs/albums démarrée en 2012 et au format un peu plus libre que ses autres albums solo, laissant place aux expérimentations diverses avec notamment pas mal d'instrumentaux. Musicalement, le ton est résolument léger, avec un côté électro-pop funky très appréciable, et côté texte on parle surtout d'amour (le côté politique se ressent un peu moins), et on en parle avec moins de gravité que sur le précédent.
Mes morceaux préférés : Come Be Me, Glow You
Ecouter sur Spotify




Bedbug - i'll count to heaven in years without season
Pop, Folk, Rock Indé, Lo-Fi, Electro-Pop, Psyché, Hip-Hop
USA
  Très beau projet de pop lo-fi bricolée avec l'authenticité d'un type faisant sa musique dans une chambre d'ado, et néanmoins avec une vraie ambition et une diversité des styles abordée appréciable, que ce soit le rock indé, le folk, la bedroom pop lo-fi ou même au travers de touches psychédéliques, synthétiques ou même rap. Très beau projet.
Mes morceaux préférés : "...inside the house was getting darker", lilies, melissa's poem part1
Ecouter sur Spotify - Ecouter sur Bandcamp - ou sur Youtube



ABC Galaxy - Oscillosaurus
Synthpop, Electro-Pop, 8-bits, Retrowave, Italo Disco, Space Disco, Nu-Rave
Russie
  Le russe ABC Galaxy offre au monde cet album gratuit, entre pop synthétique spatiale façon fin des 70's (Space, Yellow Magic Orchestra...), italo-disco et musique de jeux vidéos, mais avec une vraie oreille pour les mélodies, une composition carrée et riche et un choix des sons qui donne le sourire. Une superbe trouvaille !
Mon morceau préféré : Back
Ecouter sur bandcamp




The Alchemist - French Blend & French Blend Vol.2
Hip-Hop, Funk, Electrofunk, Soul, Rock Psyché, Jazz, Disco
USA
  Le beatmaker hip-hop génial, collaborateur, entre autres, de Mobb Deep, puise dans des samples de funk français (et francophone) et de ses dérivés rock, psyché, pop, disco, rap avec même des extraits de journaux télévisés, d'interviews... Pour en tirer toute la sève et raconter via ses remixes une autre France, une face B, la plus excitante, de sa culture musicale, et un petit quelque chose de son Histoire avec un grand H. Brillant.
Mes tracks préférées : Etoile, Tintement Bebe, Des Nuages, Clignancourt Metro, Escalier
Ecouter via bandcamp : Volume 1Volume 2



Evidence - Weather Or Not
USA
Rap, Hip-Hop, Boom-Bap
  Un album taillé comme un classique 90's, avec une production magistrale des plus grands (dont The Alchemist cité ci-dessus ou DJ Premier), et des flows impeccables comme on n'en fait plus si souvent que ça. Bel anachronisme.
Ecouter sur Spotify ou sur Bandcamp


Kaviar Special - Vortex
France
Rock, Garage Rock, Pop
  Les rennais reviennent plus fort que jamais avec un opus plus pop, avec des sonorités encore plus riches ("Run Away") mais toujours un esprit garage dévastateur les rapprochant des Oh Sees ("Dead End", "Bursting At The Seams", "Vortex"). Un album très réussi.
Mes morceaux préférés : Run Away, Dead End, Vortex
Ecouter sur Spotify




Migos - Culture II
Hip-Hop, Trap, Mumble Rap, Rnb, Pop
USA
  Un album dantesque (24 titres ! 1h40 !) avec un sacré paquet de gros tubes imparables, mais fatalement trop de remplissage. Dommage parce qu'avec un peu d'écrémage on tenait un digne successeur au très bon Culture de l'an dernier, même si ce dernier souffrait déjà de quelques longueurs. En tous cas, une constante : les beats sont excellents ici.
Mes tracks préférés : Higher We Go - Intro, Narcos, BBO, Stir Fry, MotorSport, Made Men, Culture National Anthem - Outro




Nadine - oh my!
Pop, Electro-Pop/Synthpop
USA
  Un très agréable album de pop de facture à la fois classique voire rétro et synthétique au gré des morceaux et même des mouvements à l'intérieur de chaque chanson. Dans la lignée des derniers Tennis, Radiation City, TOPS... qui ont fait mon bonheur ces dernières années. Très agréable découverte. 
Mes chansons préférées : Nook, Plinth
Ecouter sur Spotify ou sur bandcamp

Jpegmafia - Veteran
Hip-Hop, Electronique // USA
  Un album de rap déchiqueté, concassé, futuriste, déconcertant et tout bonnement impressionnant, dont il est dur de faire le tour. Fascinant, en tous cas
Ecouter sur Spotify

Dragon Rapide - See the Big Picture
Rock Indé, Pop Indé // France
  Un bel album de rock français anglophone fait avec cœur, référencé mais très personnel, assez impeccable de bout en bout (label Freemount Records). 
Ecouter sur Soundcloud (via indiemusic.fr)

Bekon - Get With The Times
Electronique, Pop, Soul-Funk, Hip-Hop // USA
  Daniel Tannenbaum, songwriter et producteur de génie, notamment pour le hip-hop, et également connu sous le nom de Danny Keyz, nous livre son premier album sous l'alias Bekon. Et si vous avez écouté le dernier Kendrick LamarDAMN., pour lequel il a produit pas moins de 8 chansons, vous serez en territoire connu, puisque stylistiquement on s'en rapproche évidemment beaucoup et que certains extraits des prods de Bekon présentées ici ont été utilisées pour l'album (notamment "America" servant de base à "XXX."). Les morceaux sont riches, souvent très orchestrés, avec un son très chaud et organique, et les voix, la plupart du temps utilisées en choeurs, sont angéliques. Et c'est amusant d'entendre comme un producteur autant dans l'air du temps est influencé par la pop baroque des Beach Boys et la soul psychédélique des Temptations.
Mes morceaux préférés : America, Cold As Ice
Ecouter sur Spotify

Chris Dave & The Drumhedz - Chris Dave & The Drumhedz
Jazz, Hip-Hop, Soul/Funk, Electrofunk, Psyché Pop, Rnb // USA
  Le très demandé batteur de Maxwell, Robert Glasper ou D'Angelo, Chris Dave a invité tout un tas de gens très recommandables (Anderson .Paak, SiR, Bilal...) pour concocter cet album de jazz à l'esprit très hip-hop, avec des zestes de P-Funk et de psychédélisme. 
Ecouter sur Spotify

Cadence Weapon - Cadence Weapon
Hip-Hop, Rnb, Dub, Pop, Electro-Pop // Canada
  Bardé de productions impeccables, cet album vise large, de l'électro-pop funky à la dub, et fonctionne particulièrement lorsqu'il s'ouvre à de nombreux horizons musicaux à la fois.
Tracks préférées : Destination, My Crew (Woooo)
Ecouter sur Spotify

Curtis Roach - Highly Caffeinated
Hip-Hop, Rap, Pop // USA
  Ce petit a un talent certain et un flow qui n'est pas sans rappeler Kendrick Lamar, avec un petit côté malicieux à la Danny Brown en plus.

Ecouter sur Youtube

Khruangbin - Con Todo El Mundo
Instrumental Rock, Pop, Funk, Soul, Psyché // USA
  Un très sympathique album de pop-rock instrumental agrémenté d'une soul-funk chaleureuse.
Ecouter sur Spotify

Shame - Songs Of Praise
Rock Indé, Grunge, Punk, Pop, Psyché/Kraut, Stoner // Royaume-Uni
  Le puissant groupe de rock british sort son premier album, piochant à la fois dans l'énergie psychédélique de Sonic Youth, période psyché, pour les guitares, dans le rock indé des années 90-2000 (Howler, Funeral Party...) et dans le punk anglais pour le chant enragé. Finalement proche de groupes comme Ulrika Spacek, la musique du groupe sait aussi se faire plus pop et rassembleuse, au risque parfois d'en faire un tout petit peu trop comme sur la pourtant bonne "Concrete". Mais globalement c'est un album qui s'écoute bien malgré ses imperfections, un peu comme chez leurs compatriotes Palma Violets. Mention spéciale à la pochette détournant habilement celle de Pet Sounds des Beach Boys.
Mon morceau préféré Dust on Trial
Ecouter sur Spotify - Ecouter sur Deezer

Hollie Cook - Vessel Of Love
Reggae, Pop, Dub, Ska, Soul, Rnb, Electro-Pop // Royaume-Uni
  Un très agréable album de reggae moderne, sensuel, fun et intelligent. 
Morceaux préférés : Angel Fire, Stay Alive 
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Nils Frahm - All Melody
Ambient, Electro-Pop, Classique Contemporain // Allemagne  
  Un bel album d'ambient intelligente et accessible à la fois.
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Alice Lewis - Imposture
Pop, Electro-Pop, Chanson Française // France
  Entre disco-punk, chanson française référencée (Polnareff, Christophe, Gainsbourg, Birkin...), ce disque est une agréable surprise.
Mes chansons préférées : La Cause et Le Remède

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De Lux - More Disco Songs About Love
Pop, Disco, Electro-Pop // USA
  Tout est dans le titre, et on n'est pas déçus par la marchandise. Ca groove, c'est fun, c'est du bonbon synthétique comme on aime.
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The Shins - Worm's Heart
Pop, Folk, Rock, Psyché, Electro-Pop // USA
  Habile relecture de leur album Heartworms (2017) qui transcende largement l'idée souvent mauvaise de l'album de remixes et s'impose comme un LP à part entière. 
Ecouter sur Spotify

The Limiñanas - Shadow People
Pop, Rock, Psyché, Garage // France
  C'est vraiment bon, ils sont bien entourés, mais comme d'habitude j'ai du mal à ne pas le trouver un peu trop scolaires. Mais cette petite objection étant faite, ce disque est réellement bien foutu, très travaillé et impressionant dans son genre.
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Mr Sawed-Off - the Janitor
Hip-Hop // USA
  Du rap bricolé à la maison, avec des instrus lo-fi approximatives et une envie d'en découdre audible dans des flows oscillant entre l'old school et le moderne, voilà de quoi faire mon bonheur.
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Judah Warsky - Avant/Après
Chanson Française, Pop, Electro-Pop // France
  Traversé d'éclats de génie imprécis et dans l'ensemble d'un courage fou, la pop bancale et poétique de ce membre de Turzi n'est pas loin d'évoquer les débuts de Katerine. Surprenant mais très cool.
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Grems - Sans Titre #7
Rap francophone, Pop, Electronique, Jazz // France
  Le rappeur impressionne et fait mouche notamment lorsqu'il laisses les influences jazz de sa musique ressortir au premier plan.
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Leyya - Sauna
Electro-Pop, Rnb // Autriche
  Très cool disque d'électo-pop, moderne et fraîche. 
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St Beauty - Running To The Sun
Rnb, Pop, Soul-Funk, Folk // USA
  Un superbe petit album de rnb alternatif, à la fois arty et ensoleillé, sorti sur le bon label Wondaland de Janelle Monaé.
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Burna Boy - More Life
Rnb, Pop, Dancehall, Hip-Hop, Afrobeats // Nigéria
  Un album de dancehall vraiment bien foutu, à peine gâché par un feat oubliable avec Lily Allen. 
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Sopico - Yë
Rap francophone, Pop, Chanson Française, Electro-Pop, Rnb, Folk // France
  Autre bonne surprise de rap français de ce mois-ci, Sopico représente un peu tout ce que les gens apprécient chez Lomepal sans son côté irritant et un peu mal écrit. 
Ecouter sur Spotify




BILAN EPs & MIXTAPES

Persuasion - Quatermass EP
Techno, Dub
Royaume-Uni
  Un excellent EP de techno sombre et minimaliste, dansante, planante et menaçante à la fois, avec ces petites influences dub nourrissant un son très british. Sorti sur le très bon label Opal Tapes dont je vous recommande aussi cette compilation d'électronique abstraite.
Ma track préférée : Damask Silk
Ecouter via bandcamp

Panda Bear - A Day With The Homies EP
Electro-Pop, Psyché
USA
  Dans la continuité de ses dernières œuvres, en un peu plus lo-fi et minimaliste, Panda Bear laisse les beats parfois quasiment dansant prendre le premier plan et les accompagne de sa voix rêveuse. Une oeuvre mineure de l'artiste, mais qui reste toutefois intéressante dans l'absolu et d'une qualité pour laquelle beaucoup d'autres artistes tueraient, car on parle quand même de Panda Bear.

Drake - Scary Hours

Hip-Hop/Rap, Rnb, Pop, Electro-Pop
Canada
  Dans deux genres différents, électro-pop revue façon cloud rap croonée façon rnb autotuné pour "God's Plan" et instru classique de rap triste avec orchestre et flow monolithique mais efficace (qui a dit Rick Ross ?) pour "Diplomatic Immunity", Drake montre une fois de plus en sortant ces deux singles très corrects et plutôt classes qu'il est too big to fail. Dommage que son équipe ait apparemment pompé la pochette de ce mini EP (nommé Scary Hours, au passage).
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BILAN SINGLES
***On a adoré :



Gwenno - Tir Ha Mor
Pop, Rock, Psychédélisme, Electro-Pop, Folk
Royaume-Uni, Cornouailles
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  Un envoûtant single pop, signé Gwenno, anciennement du groupe The Pipettes. Cette superbe pop song acide et agrémentée d'électronique, quelque part entre Tame Impala, Barbagallo et Melody's Echo Chamber a la délicieuse particularité d'être chantée en cornish, langue celtique de la Cornouailles britannique. Et d'être très bonne, même si je l'ai déjà dit.
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MGMT - Hand It Over
Pop, Rock, Psychédélisme
USA
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 Une magnifique pop song clôturant avec émotion l'album à venir de MGMT, , et qui s'annonce excellent avec déjà deux autres singles éblouissants dont on vous a déjà parlé. Un beau retour au son riche, chaud, de Congratulations, avec de petits claviers façon Beatles de la dernière période, une basse liquide impeccable, et une intensité crescendo appuyée par des choeurs déchirants. 



Of Montreal - Paranoid Intervals / Body Dysmorphia
Pop, Rock, Psychédélisme, Electro-Pop, Synthpop, New Wave, Post-Punk
USA
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  Ce titre évoque clairment les influences des maxi new wave / synthpop / disco citées par le cerveau Kevin Barnes, mais dans l'esprit débridé de précurseurs comme Soft Cell, The Cure, New Order, ou Patrick Cowley. Un très bon single, pas évident à la première écoute mais qui commence à se révéler dès la deuxième pour accrocher complètement.



Kali Uchis, Bootsy Collins & Tyler, The Creator - After The Storm
Soul-Funk, Rnb, Electrofunk, Pop, Hip-Hop, Psyché
USA
  L'excellente Kali Uchis, entendue sur pas mal de collaborations prestigieuses ces dernières années, fait un pas de plus vers la reconnaissance qu'elle mérite avec cet excellent single produit par Bootsy Collins et Tyler, The Creator (rien que ça!). La chanson est langoureuse, rappelle un peu le classique "Never Gonna Give You Up" avec cette classe intemporelle transcendant les genres musicaux. En plus le clip est très très bien foutu, et la pochette est ma préférée du mois avec ce côté classe hyper cinématographique. Bref, tout ce qui concerne ce single est parfait.
Regarder le clip sur Youtube




**On a bien aimé :

Parliament & Scarface - I'm Gon Make U Sick O'Me
P-Funk, Electro-Funk, Psyché, Soul, Rnb, Pop, Hip-Hop // USA
  Le papa de la P-Funk, George Clinton, réactive son légendaire groupe pour un feat avec le rappeur Scarface visiblement ravi d'être entraîné dans ce tourbillon funk de folie. Excellent come-back, moderne, qui a le mérite de rappeler aux plus jeunes l'influences fondamentale du monsieur sur le rap, le rnb, l'électro, le funk et la pop modernes.

Dita Von Teese & Sébastien Tellier - Bird Of Prey
Electro-Pop // France-USA
  Premier single d'un album collaboratif à venir, la prod est du grand Tellier, sur lequel le chant susurré de la pin-up ne peut que se poser à merveille. De la dentelle confectionnées avec amour et malice par un Tellier d'inspiration décidément très visuelle ces derniers temps, après de nombreuses BO réussies. Ne passez pas à côté de "Rendez-Vous" non plus, elle est tout aussi aimable.

Hayley Henderickx - Untitled God Song
Pop, Folk // USA
  Pas grand chose à dire de plus si ce n'est : foncez écouter cette superbe chanson déchirante.

Jerry David DeCicca - Time The Teacher
Alt-country, Folk, Gospel, Pop // USA - Royaume-Uni
  Entre diction façon Dylan et Lou Reed, ou plus récemment Kevin Morby, choeurs gospel, instrumentation folk délicate, et jazz déguingandé cette chanson est un OVNI, mais dans le bon sens du terme. 

Laurie Anderson & Kronos Quartet - We Learn To Speak Yet Another Language / The Water Rises / Our Street Is A Black River
Pop, Classique Contemporain // USA
  Ces singles précédent un album collaboratif annoncent un album expérimental mais néanmoins accessible, qui promet d'être passionnant. 
A écouter sur le Spotify de Laurie Anderson (rubrique "singles")

(Sandy) Alex G - Fay
Pop Indé // USA
  Chanson isolée ou faisant partie d'un nouveau projet, peu importe tellement la qualité de la compo est au rendez-vous. 
Ecouter sur Youtube

Danny Fox Trio - Caterpillar Serenade
Jazz, Classique // USA
  Superbe morceau de jazz, délicat comme du classique, à écouter en boucle.
Sur Spotify - Sur Deezer


The Garden - No Destination
Pop, Post-Punk // USA
  Très bon single aux influences post-punk augurant du meilleur pour leur prochaine sortie.
Clip sur Youtube

Unknown Mortal Orchestra - American Guilt
Glam Rock, Pop, Grunge, Garage-Punk, Hard Rock, Psyché, Funk-Rock // Nouvelle-Zélande
  Ce retour de nos kiwis préférés est vraiment surprenant, beaucoup plus rock voire même hard que ce à quoi l'esthétisme pop du groupe nous avait habitué, même si la deuxième partie de II naviguait déjà dans des eaux certes plus tranquilles, mais relativement semblables. Mais après tout pourquoi pas, ce single n'est pas aussi incroyable que ceux des précédents mais il fonctionne, et j'ai hâte de l'entendre dans le contexte de l'album.
Ecouter sur Youtube

Dabrye & MF Doom - Lil Mufukuz 
Rap, Hip-Hop, Jazz, Boom Bap // USA
  Un bon morceau de rap old school mais pas trop passéiste, mystérieux, hors du temps et menaçant, à la hauteur de la légende de MF Doom.
Ecouter sur Youtube

Rolling Blackouts Coastal Fever - Mainland 
Rock, Pop Indé // Australie
  Ce morceau des australiens est très efficace dans son genre, quelque part entre Real Estate, Cloud Nothings, Oasis, The La's et Parquet Courts.
Ecouter sur Youtube

Dreezy & 2Chainz - 2nd To None
Hip-Hop, Rnb // USA
  Cette collab aboutit à un morceau bien efficace, un gros banger rap qui claque comme il faut.
Ecouter sur Spotify

James Blake - If The Car Besides You Moves Ahead

Electro-Pop // Royaume-Uni
  Un retour ultra kiffant aux expérimentations électroniques pour un James Blake qui s'était un peu perdu dans une soul triste tournant un peu en rond ces derniers temps. Très encourageant.
Ecouter & regarder le clip sur Youtube

Trippie Red & Swae Lee - TR666
Rnb, Electro-Pop, Hip-Hop // USA
  Le rnb psychédélique de ces deux-là fusionne à merveille, et me rappelle cruellement que mon rêve d'entenre un album de Rae Sremmurd (et Trippie Red du coup ?) produit par les Flaming Lips, ne se réalisera probablement pas. Too bad. En attendant, il reste cette superbe chanson.
A écouter sur Youtube


Alex