Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes
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jeudi 30 avril 2020

Black Dresses - Peaceful As Hell (2020)


  Après deux albums percutants sortis l'an dernier (dont mon ptit préféré Thank You qui a fini dans mon top 10 de l'année), les deux Black Dresses reviennent déjà avec ce Peaceful As Hell

  Qui commence hyper fort avec un morceau parmi leurs plus intenses, "Left Arm of Life" où une voix rongée par la distorsion chante son blues sur un tapis de beats qui s'abattent comme des obus sur l'auditeur dévasté, tandis que les synthés détunés montent en intensité. Un morceau de bravoure, d'entrée de jeu.

Black Dresses - Left Arm Of Life (2020)

  Les influences venues du rock des années 2000, avec un peu d'indus et de post-punk ("MiRRORGiRL", "Express Yourself") un peu de nu-metal (voire du franchement metal, cf l'intro de "Beautiful Friendship"), du rock indé et de l'électro-pop infusent ce disque, souvent sur le même morceau, comme "Damage Suppressor" qui peut passer d'un début rock à une partie au piano presque Of Montreal pour enchaîner avec un mélange explosif d'electroclash, d'indus et de nu-metal. Mais malgré le côté déflagration et la surstimulation auditive induite par les changements brusques et fréquents de tempos, de sonorités, le tout reste ultra cohérent et très accrocheur, et on retrouve un peu -dans un style totalement différent, avec une écriture plus pop-rock et en moins décousu- le génie des 100gecs à passer d'une idée à l'autre à toute vitesse sans perdre le fil et en faisant monter l'adrénaline tout le long ("Angel Hair", "Bliss And Stupidity").

Black Dresses - Damage Suppressor (2020)

  Ce disque est une vraie expérience, et le déluge de stimuli et la magie de la noise ("Impossible Dream") forcent vraiment l'attention de l'auditeur, lui faisant perdre toute notion du temps et le faisant entrer dans un genre d'univers parallèle fait de rock bruitiste et de synthés baveux ("Sharp Halo"). Comment ne pas ouvrir son esprit et remettre en cause sa réalité lorsqu'on tombe sur un "I'm A Freak Cuz I'm Always Freaked Out" après 4 morceaux qui nous y ont formidablement bien préparé en faisant tomber une à une nos barrières mentales. 

Black Dresses - Please be Nice (2020)

  Et puis il y a "Maybe This World Is Another Planet's Hell", synthpop mélancolique et émotionnellement dévastatrice, aussi cool, intense et épique que son titre le laisse suggérer. Sur laquelle s'appuie le début de "Scared 2 Death" qui poursuit le délire en y ajoutant une guitare presque prog, une sub puissante, puis part carrément en délire nu-metal. Autre moment marquant : la conclusion "666", tournant sur des patterns de synthé obsédants et grésillant. Il y a aussi 2 tubes : "Please Be Nice", aussi puissant et violent qu'accrocheur et mémorable, et "Creep U", plus frontalement rock 90's et dépouillé et plus accessible pour le néophyte.

Black Dresses - Creep U (Clip 2020)

  Bref, c'est un autre tour de force de la part de Devi McCallion et Ada Rook, d'une ampleur au moins égale au fantastique Thank You, qui déroute et surprend à chaque instant pour le meilleur.

Mes morceaux préférés : Left Arm of Life, Damage Suppressor, Beautiful Friendship, Please Be Nice, I'm A Freak Cause I'm Always Freaked Out, Maybe This World Is Another Planet's Hell, Creep U, 666


Alex



dimanche 1 mars 2020

Grimes - Miss Anthropocene (2020)


  La trajectoire de Grimes est assez fascinante. Venue d'une scène DIY canadienne, elle a doucement peaufiné son style à coup d'albums bricolés sur Garageband avec talent, expérimentant avec la pop, ses sous-genres, ses sons, ses structures (Geidi Primes et Halfaxa au début de la décennie). Puis elle a passé un pallier avec Visions (2012), oeuvre ultra aboutie, à l'esthétique unique et au pouvoir d'attraction remarquable tant pour les hipsters snobs que pour le grand public pop. Puis Art Angels (2015) a à peu près convaincu tout le monde, sa production impeccable et ses mélodies imparables compensant ses tournants expérimentaux et son tropisme vers la transcendance d'une certaine idée du mauvais goût pop. Outre le fait que naturellement, sa musique a énormément gagné en popularité et en respectabilité avec les classements des meilleurs albums de la décennie et ce genre d'honneurs, sa vie privée a commencé à faire parler d'elle, et ça c'est le genre de trucs qui mettent un effet de loupe important sur un.e musicien.ne de la scène indé. Mais après tout, Claire Boucher de son vrai nom ne s'en est jamais cachée, elle est autant fascinée par les pionniers expérimentant avec des formes underground de musique que par les plus grandes popstars, et elle a embrassé ce nouveau statut avec un naturel désarmant dans ce nouvel album.

Grimes - Delete Forever (Clip, 2020)

  En effet, Miss Anthropocene est un album concis, très accrocheur, assez pop. Pas tout à fait dénué des digressions qui caractérisent les longs formats de Grimes, et en diluent parfois l'impact, ce LP en contient néanmoins assez peu, et a une tendance salvatrice à aller à l'essentiel. La thématique du disque est originale, le changement climatique vu comme une force positive à travers tout un bestiaire de démons, déesses etc qui en sont responsables / qui l'accélèrent (j'ai pas tout pigé mais c'est pas très important). Au passage, le nom du disque est un jeu de mot entre miss, misanthrope et anthropocène. On sent en tous cas une accentuation du côté grandiose, cosmique, cinématographique qui marque le son de Boucher, et notamment ce qu'elle fait de sa voix, afin de coller à ce thème bigger than life. C'est particulièrement vrai de "So Heavy I Fell Through The Earth", morceau épique aux proportions dantesque, pourtant presque ambient, qui prend une dimension nouvelle après l'annonce de la grossesse de son auteure. 

Grimes - So Heavy I Fell Through The Earth (Clip, 2019)

  Sur ce morceau comme sur beaucoup, Grimes utilise pas mal de marqueurs musicaux des années 90-début 2000, avec une pop post-trip-hop, planante, post-électronique ("You'll Miss Me When I'm Not Around", "Before The Fever", "IDORU"). On a par exemple une énorme ballade new age sur "New Gods", des rythmiques jungle et un côté joueur façon Big Beat sur la très cool "4AEM", le tout saupoudré d'une dose d'orientalisme dans les vocaux. L'orientation emo / nu-metal de "My Name Is Dark" et de "We Appreciate Power" (bonus track géniale, avec HANA) surprend autant qu'elle titille les circuits de récompense. 

Grimes - My Name Is Dark (2020)

  On est également étonnés par "Delete Forever", entre Oasis, Shania Twain, Natalie Imbruglia et cie, qui se révèle être une chanson totalement déchirante et obsédante (je l'ai non stop dans la tête depuis 2 ou 3 semaines) de space country (terme à la fois débile et génial utilisé par un commentateur youtube). Ce morceau, écrit suite au décès par overdose de Lil Peep, résonnant avec des expériences personnelles vécues par Grimes, parle évidemment de drogues, d'abus, de mort, avec beaucoup d'émotion. Quelques influences plus modernes traversent également le disque, comme la post-trap de "Darkseid" avec PAN, et le projet dans son ensemble sonne ultra-contemporain voire futuriste. Claire Boucher met d'ailleurs à jour le son qui l'a fait exploser en 2012 avec la géniale "Violence", co-roduite par i_o.

Grimes & i_o - Violence (Clip, 2019)

  En résumé, c'est une vraie réussite pour Grimes, en allant un peu plus vers la pop, et à l'aide d'une production colossale et très claire, tout en essayant d'être la plus concise possible, elle a abouti à un album vraiment prenant de bout en bout, qui malgré quelques petites longueurs se tient très bien, et contient un sacré paquet de perles, faisant partie sans problème de ses meilleures chansons. Un pari, et un changement de dimension, plus que réussis.

Mes morceaux préférés : So Heavy I Fell Through The Earth, Delete Forever, Violence, My Name Is Dark, 4AEM, We Appreciate Power

A écouter sur Spotify ou Deezer

Alex