Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

vendredi 3 juin 2016

The Beatles - Help! (1965)



  La gueule de bois post-Beatlemania aperçue sur Beatles For Sale atteint son pic l'année suivante avec ce Help! d'anthologie. Qui commence avec "Help!", ce hit incroyable, d'une énergie folle qui rappelle l'album A Hard Day's Night, mais avec plus de subtilité dans la musique et surtout un fond déchirant : le mal-être de Lennon transparaît partout. Paroles, chant, instrumentation frénétique. C'est un appel à l'aide. Lessivé, ayant pris du poids, défoncé à l'herbe 24h/24, John traverse sa période Fat Elvis. Et nous balance toutes ses névroses en guise de catharsis. Et c'est très, très puissant, comme un uppercut en pleine face. Impossible de ne pas être bouleversé par ce morceau titre.

  McCartney va apparemment mieux car il nous offre un tube pop lui aussi pas mal réminiscent de A Hard Day's Night, "The Night Before", pop song à consommer sur place, délicieusement accrocheuse et énergique comme aux débuts à défaut d'être incroyablement inspirée. Le groupe aurait-il délaissé l'orientation folk et effectué le premier pas en arrière de sa carrière ? Lennon dément tout de suite avec un "You've Got To Hide Your Love Away" plus Dylan que Dylan. Et une nette amélioration dans les paroles avec ce texte acide. Merveille de folk/rock acoustique, ce morceau est un vrai chef-d'oeuvre à ranger avec les premiers Dylan et Byrds. Et y'a pas à dire quand on intègre du folk dans du rock ou de la pop, ça sonne très proto-psychédélique, entre la guitare de Harrison, le tambourin, les maracas et les flûtes, on s'approche doucement mais sûrement du Summer Of Love




  Harrison émerveille avec son "I Need You" qui sonne comme une chanson typique du début des Beatles (le chant), mais avec une musicalité inédite : les choeurs doo-wop, le son de la guitare électrique, le tranchant de la guitare folk, les petits détails rythmiques, l'écho sur la voix doublée, tout cela est d'une finesse incroyable. Une magnifique chanson Mersey Beat amélioré en quelque sorte. Ce retour au sources amélioré s'entend aussi sur "Another Girl", portée par un Macca d'humeur à la fusion entre le blues-rock et la pop de leurs débuts. Là encore, la profondeur des arrangements et l'interprétation impeccable nous font plonger dans le morceau (et ces choeurs !), pour ne pas en décrocher jusqu'à la fin. Excellent morceau.

  "You're Going To Lose That Girl" est également conçue sur la même base que les tubes passés, à la "It Won't Be Long", mais avec l'expérience et le savoir faire accumulés par le groupe, ce doo-wop se gorge de milliers de petites choses (solo de guitare rockabilly, bongos, et toujours ces choeurs...) qui la rendent unique et indispensable. Et là encore, l'interprétation de Lennon est parfaite. Donc si on résume pour le moment cette face A, les Beatles semblent faire l'inventaire de leur début de carrière déjà impressionnant pour en extraire le meilleur et l’accommoder avec leur talent grandissant d'interprètes, leurs arrangements plus sophistiqués et leurs nouveaux goûts musicaux (la folk...). Mais ce n'est pas si simple, Help! n'est en effet pas qu'un bilan amélioré des débuts des Beatles, car en réalisant cette synthèse ils posent aussi les premières pierres de la suite avec la dernière chanson de cette face A : "Ticket To Ride".



  Avec son intro là encore très proto-psychédélique à la guitare byrdsienne, son tambourin et ces lignes vocales mythique, le morceau porté par John explose les limites de ce qu'on attend d'une chanson pop. Le changement de rythme en milieu de morceau, les arpèges dans tous les sens, les micro-soli de guitare, les breaks de batterie.... Tout cela contribue à dessiner une toile sonore d'une infinie richesse, et à la fois d'une pureté et d'une légèreté inégalable. Un sommet. "Ticket To Ride" annonce déjà les Rubber Soul et Revolver à venir, le psyché, et la musique de la décennie suivante. Et pose les bases d'une pop exigeante et novatrice.

  Pour se remettre du choc esthétique, Ringo nous sort sa reprise du morceau country/rockabilly, "Act Naturally", sympathique moment sur lequel il n'y a pas grand chose à dire (sans aucune condescendance). "It's Only Love", le morceau suivant, chanté par John principalement, joue avec des sons de guitare très Shadows / Joe Meek, et une guitare acoustique beatnik, pour un résultat assez réussi, même si moins marquant que le reste du disque (un peu comme "The Night Before" donc). Harrison innove avec un morceau porté par le piano "You Like Me Too Much", qui commence en mode piano bar, décolle avec ce chant sous écho, avant de prendre son envol avec les choeurs divins du groupe. Très belle (et courte) chanson qui explore elle aussi, comme la précédente, une certaine fascination pour les US. 





  "Tell Me What You See" est elle plus folk, et a droit elle aussi à ses petites fantaisies rythmiques (le guiro de McCartney, les claves et le tambourin de Ringo) et mélodiques (les soli de piano électrique joués par Macca). "I've Just See A Face" est elle carrément très country, une excellente chanson chantée en majorité par Macca, jouée pied au plancher avec de superbes parties de guitare. Et là encore, c'est très court mais bon. Bon, depuis "Ticket To Ride", il y a quand même une baisse de régime dans l'album, avec des parties moins intéressantes et d'autres très bonnes mais trop courtes ou manquant du je-ne-sais quoi qui fait les classiques. 

  Mais McCartney sort de sa manche un joker : "Yesterday", qui avec sa guitare et son chant tire-larmes, et ses cordes baroques (merci George Martin), est un tube évident. Et renouvelle le genre de la ballade de belle façon en dépoussiérant les grandes chansons d'amour façon Sinatra façon pop. Un classique qui mérite son titre,et augure des futures grandes ballades du groupe, de "Girl" à "Something" en passant par "Eleanor Rigby" et "She's Leaving Home"




  Le groupe finit sur la traditionnelle reprise rock, ici "Dizzy Miss Lizzy" par Lennon, très bonne mais qui casse un peu l'ambiance instaurée par la chanson précédente, sur laquelle le disque aurait tout à fait pu se terminer.

  Bref, Help! est comme son prédécesseur, un disque de transition entre la première période du groupe dont l'apogée reste A Hard Day's Night, et la suite plus expérimentale dont on observe les prémices. Il y a des tubes, et de bonnes chansons, mais encore un peu de remplissage et de reprises pas franchement indispensables, ce qui nuit à l'homogénéité du disque. C'est néanmoins une étape cruciale du groupe, qui va bientôt redéfinir la musique populaire. Mais ça, c'est pour la prochaine fois ! 

A suivre, donc....




Pour réécouter Help!, en attendant, c'est par ici.

Merci pour votre lecture et vos commentaires 

Alex

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