Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

jeudi 4 juin 2020

L'art de la reprise (& du sampling) #4 - Hall & Oates


  Cette petite série d'articles a pour but  de partager quelques-unes des reprises et réinterprétations (ça inclut le sampling) qui m'ont le plus marquées récemment, et ça vous permettra peut-être de vous la ramener en soirée avec des trucs moins évidents que la liste ci-dessus (même si elles sont très bien).

  Aujourd'hui, on va parler d'une chanson, une de mes petites préfs, "I Can't Go For That (No Can Do)" de Hall & Oates. Alors déjà, voici l'originale, un petit bijou qui fait le lien entre le soft rock 70's et la pop 80's triomphante de Michael Jackson ou Phil Collins.

Daryl Hall & John Oates - I Can't Go For That (No Can Do) (1981)

  Le truc unique avec ce titre, c'est qu'il a un côté obsédant, hors du temps, irréel, tout en étant un tube, au texte accessible (ça peut aussi bien parler d'une rupture que d'une lassitude vis-à-vis de l'industrie musicale, entre autres). Et ça, ça a inspiré pas mal de monde, notamment dans le monde du hip-hop et de l'électro, qui ont su sampler ou reprendre une ligne mélodique de ce morceau pour en faire autre chose. Quelques exemples ultra réussis ci-dessous :

2 Live Crew - I Can't Go For That (1988)

De La Soul - Say No Go (1989)

Above The Law - V.S.O.P. (1993)

Trigger Tha Gambler - My Crew Can't Go For That (1996)

The xx - On Hold (2016)

  J'ai écouté pas mal de reprises, et si certaines n'étaient pas mauvaises, loin de là, aucune n'apporte ce qu'une reprise vraiment réussie est censée apporter à un titre. Et au final, je trouve que c'est un bel argument en faveur du sampling (si jamais il reste quelques conservateurs totalement allergiques au procédé). D'abord parce que ça permet de créditer les inspirations d'un morceau plus honnêtement que par un pillage/recopiage (cf Led Zeppelin & le blues, les Beach Boys & Chuck Berry etc...), voire de les rémunérer puisqu'on réutilise leur son. Les créateurs originaux s'y retrouvent. D'un point de vue artistique, c'est un hommage d'autant plus fort aux travaux de base, plus fort encore qu'un emprunt de ligne mélodique par exemple, car plus intime, on touche directement à la matière sonore sculptée par ses prédécesseurs. 

  Enfin, et c'est là où je voulais vous emmener, c'est parfois le seul moyen de rendre justice à un morceau. Sur une chanson où l'ambiance prime autant que sur "I Can't Go For That (No Can Do)", il est parfois difficile de retranscrire la magie, l'étincelle du morceau de base, surtout lorsqu'il est si minimaliste, à l'équilibre si fragile. Parfois, la seule solution, c'est d'échantillonner un bout de cette magie et de la re-contextualiser telle qu'elle un peu plus loin. C'est évidemment loin d'être impossible de reprendre avec brio cette chanson, mais j'attends encore l'exemple, alors que le sampling présenté ici (et il en existe d'autres exemples) est à chaque fois marquant. Dans certains cas, la magie du sampling apporte quelque chose d'unique, impossible à reproduire avec une autre technique, et c'est ce qui fait du sampler un instrument comme les autres, et légitime évidemment totalement la technique d'un point de vue théorique mais également purement musical.


Alex


2 commentaires:

  1. Je me suis jeté sur ton texte, et les titres choisis. Je suis un inconditionnel des Hall & Oates. Paradoxe bizarre, j'approuve et comprends tout ce que tu écris, mais l'écoute me donne parfois un autre sentiment, seulement si je reconnais l'emprunt, une drôle de sensation de titre fantôme, pas intégré comme dans le XX mais posé comme un souvenir, cela donne un effet étrange de clin d'oeil tourné vers le passé: De La SOul & 2 Live. Moins Above où le gimmick m'aurait été peut-être familier mais sans ton papier, si fugitif que je n'au rai pas reconnu, peut-être un peu énervé à chercher? Conclusion reconnaître de manière évidente l'emprunt c'est davantage du collage que du sampling, c'est pourquoi je parle de fantôme comme une image qui se superpose. Ce n'est pas une critique en fait, juste l'expression d'une impression qui l'emporte

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tu as mis les mots justes, avec ce "fantôme" car le morceau de base a cette qualité brumeuse, fantomatique et je trouve que sa réutilisation dans d'autres morceaux accentue ça et c'est ce qui rend ces samples savoureux a mon oreille en tous cas.
      J'aime les deux démarches, le sample brut, tel quel, et celui presque non reconnaissable hyper modifié, sans préférence, c'est suivant l'utilisation.
      Le côté collage est sympa justement, les juxtapositions un peu brute justifient la référence a la technique visuelle du collage c'est vraiment à part en termes de rendu c'est beau.
      Merci pour ton passage et tes avis en tous cas ! Et ça permet de souligner un point que j'ai pas abordé : forcément le ressenti est très influencé par notre affect et notre familiarité avec l'original ! Là aussi on pourrait disserter un peu ! Merci pour avoir enrichi l'article ;)

      Supprimer