Après un premier album homonyme quasi-parfait sorti en 2012, et un bon successeur, Born Under Saturn (2015), enfonçant le clou d'une pop intello très arty et référencée, mais également joueuse et accrocheuse (malgré quelques excès en termes de productions), les british Django Django reviennent avec ce Marble Skies sorti la semaine dernière.
Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'on n'a pas complètement gommé le petit côté too much de la production qui fait tout le charme du groupe quand c'est réussi, mais qui peut également lasser le long des morceaux les moins inspirés. Cette production grandiose claque dès l'introduction, avec "Marble Skies" qui sonne comme un tube synthpop façon Depeche Mode des débuts, avec des synthés très rythmiques, une mélodie implacable façon Beatles et une rythmique martelée. Puis le titre prend des détours psychédéliques avec cordes jouées au synthé et cette guitare si particulière, entre post-punk et surf, qui est une des marques de fabrique du groupe. C'est particulièrement agréable sur le final du morceau dans lequel tous ces éléments se fondent admirablement. Au final, ce morceau est une vraie petite bombe. D'ailleurs, si vous ne pensez pas à Depeche Mode sur la massive "Beam Me Up", c'est que vous ne connaissez pas Depeche Mode.
Django Django - Tic Tac Toe & First Light (Live At Bar Gallia, 2018)
On notera que "First Light", single de leur 2e album, sonne aussi très Depeche Mode
Le virage synthétique est confirmé sur "Surface To Air", dont le chant assuré par le groupe électro-pop Self Esteem donne une coloration 80's à ce single au final très rassembleur. Impression renforcée par une rythmique un chouia "tropicale" appuyée par une ligne mélodique elle même très mécanique, un peu comme dans la pop mondialiste post-house de Jamie xx par exemple. Cette chanson étonnante mais efficace laisse également penser que David MacLean, le batteur-producteur leader de Django Django, pourrait avoir une carrière de producteur de pop synthétique à la fois populaire et intéressante à la Trevor Horn des Buggles (Frankie Goes To Hollywood, Pet Shop Boys, Grace Jones, Paul McCartney, Marc Almond, Yes...). Il y a un côté british indéniable et inimitable dans cette approche de la musique.
Le point d'orgue de cet album est d'ailleurs un exercice de style éminemment Buggles : "Sundials". Entre un sens de la mélodie imparable digne des Beatles, un jeu sur les filtres et les textures des instruments très intéressant et une construction audacieuse du morceau, c'est une pop song de génie qui trône au somment de l'album.
Django Django - In Your Beat (Clip, 2018)
Le single "In Your Beat" est également réussi, avec un côté presque dance (encore plus fragrant sur "Real Gone") appuyant les convergences avec par exemple les Pet Shop Boys que je viens d'évoquer. Mais, ailleurs, les synthés sont parfois utilisés pour des usages plus psychédéliques comme sur la funky "Fountains", ou sur la bonne "Champagne" au son liquide et à la basse énorme ayant le mérite d'illustrer la proximité artistique entre les Django Django et leurs compatriotes de Temples, qui ont eux aussi pris un virage synthétique récemment. Ce morceau est plus proche de ce qu'on attend du groupe, tout comme "Tic Tac Toe", qui aurait pu figurer sur les deux précédents avec son côté bondissant et un poil plus rock, ou le bon "Further", davantage centré sur la guitare et plus épuré.
Django Django - Tic Tac Toe (Clip, 2018)
C'est un album étrange à écouter et à chroniquer, car un peu à la manière du Temples de 2017 justement, il est bon, avec des singles accrocheurs, mais on est tellement dans une période d'abondance de sons nouveaux qu'un album "bon mais pas si innovant et/ou tubesque que ça" a parfois du mal à trouver complètement sa place dans nos coeurs, ce qui est un peu injuste mais compréhensible. Et avec l'accélération du temps musical, le néo-psychédélisme et le néo-80's, deux mouvements de la fin des années 2000, commencent sérieusement à nous sembler dater tant ils font partie du paysage musical et ont inspiré un nombre de groupes impressionnant, pour la plupart disparus. C'est un peu le même anachronisme étrange que l'on a ressenti en entendant les disques de LCD Soundsystem ou Grizzly Bear de l'an dernier. Ces groupes vitaux des années 2000 sont loin d'être vieux, pourtant leur âge d'or si proche nous semble si loin.
Cet album est donc plutôt réussi, sans chanson trop en dessous ni faute de goût, avec quelques vraies réussites et un niveau globalement très homogène, et complète agréablement la discographie de ce groupe attachant. Ce n'est ni le "tournant pop" ni la grande révolution synthétique pour Django Django, c'est un peu des deux et c'est surtout l'évolution logique de leur son, et c'est aussi cette intégrité qu'on apprécie chez eux.
Alex
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