Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

mardi 23 octobre 2018

IDLES - Joy As An Act Of Resistance. (2018)


  IDLES est des groupes de rock anglais les plus passionnants, un de ceux qui portent encore haut la torche du punk et arrivent à offrir une musique fidèle au genre mais actualisée et plus que pertinente, voire percutante. C'est sans doute leur plus grande réussite, arriver à estomaquer, à surprendre, à créer l'urgence, l'imprévisibilité dans la forme, pour mieux faire passer un fond radical, moderne et salvateur. 

IDLES - Colossus (Clip, 2018)

  C'est sur un ton menaçant, entre blues théâtral post-Jim Morrison et post-punk hargneux, que démarre l'album avec "Colossus". Les paroles évoquent le  rock gothique grandiose et sombre de Nick Cave ("Forgive Me Father / I Have Sinned") et musicalement on est proche de l'intensité bouillonnante des derniers Iceage et du psychédélisme plombé des meilleurs Black Angels, avant de virer totalemet punk garage sur un final fun comme du Hives. Ce côté rythmé et bagarreur du rock garage fait également les beaux jours de "I'm Scum", qui possède quelques belles parties de guitares aussi bonnes que du Shopping et un texte génial dont voici un petit extrait bien représentatif : "I Don't Care About The Next James Bond / He Kills For Country, Queen And God". Il y a parfois dans cette approche musicale un côté rock des années 2000, comme sur "Danny Nedelko", pas si loin d'Interpol ou des Strokes à leur plus énervé, ou de la folie post-Talking Heads de Ought. On remonte un peu plus sur l'épique "June" qui fait dans la ballade rock déglinguée post-Pixies, avec un côté épique venu tout droit de Springsteen en passant par chez les Arcade Fire dark du deuxième album. On entend encore ces derniers, ainsi qu'un peu de Dead Kennedys, sur une rythmique sautillante à la Buzzcocks, accompagnée d'une basse énorme comme chez Joy Division, sur la très bonne "Television", qui prend le parti d'utiliser le pronom "she" pour parler de Dieu.

IDLES - Danny Nedelko (Clip, 2018)

  On pense au punk post-hardcore, pas si éloigné d'un certain esprit metal (ou au moins hard, comme sur "Gram Rock"), des premiers Iceage sur "Love Song" ou "Never Fight A Man With A Perm", qui se permet de détourner Nancy Sinatra avec une malice punk qui rappelle le Johnny Rotten des Sex Pistols, tandis que c'est son autre groupe culte, Public Image Limited, dont l'ombre se fait parfois sentir dans la noirceur de la musique des IDLES. 

IDLES - Samaritans (Clip, 2018)

  Une autre citation génialement détournée est celle du "I Kissed A Girl" de Katy Perry dans "Samaritans". La chanson traite de la masculinité toxique, et entre un "The Mask Of Masculinity / Is A Mask / A Mask That's Wearing Me" et un "This Is Why / You Never See Your Father Cry", le choc d'entendre un gros "I Kissed A Boy And I Liiiiked It" chanté avec cet accent anglais si lié au punk, sur une grosse guitare, est à la fois jouissif et génial pour servir le propos, et illustre à quel point les IDLES font bien du punk en 2018.  

IDLES - Great (Clip, 2018)

  Le chant est un gros point fort du disque. Par exemple, sur "Great", la voix peut passer d'une rage punk à une vibe plus nostalgique, qui fait penser de façon troublante au chant de James Murphy de LCD Soundsystem. Sur "Cry To Me", elle séduit même par un côté presque sexy, dans la lignée lointaine d'Elvis, passé entre temps à la moulinette de chanteurs comme Iggy Pop ou Josh Homme. La musique, sorte de rockabilly de l'apocalypse, passé au travers d'un filtre nihiliste de psychédélisme lourd, aide cependant beaucoup à établir cette ambiance.

  Si l'immédiateté et la concision sont deux points forts du disque, le groupe sait aussi avoir des ambitions et les faire entrer dans sa volonté d'efficacité, ainsi plusieurs morceaux passent la barre des 5 minutes et possèdent des constructions en plusieurs partie. Le meilleur exemple étant "Rottweiler", dans lequel le groupe étend le morceau sans sacrifier à l'urgence et à la dangerosité qui font tout l'intérêt du morceau et qu'on sent proche de celle d'un concert, ce qui augure de très gros live pour ceux qui auront la chance de les voir jouer.

  En bref, c'est pour moi un disque de punk essentiel, une belle façon de renouveler, dynamiter et réveiller le genre tant musicalement que dans les thèmes abordés et la façon de les aborder, qui prend des leçons venues de nombreux autres horizons musicaux pour les appliquer au sien avec brio. Un grand disque, très réfléchi mais empli d'une fureur jouissive et salvatrice, que je vous recommande absolument.


Ecouter sur Spotify ou Deezer ou Bandcamp

Alex


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