Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes
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mercredi 27 septembre 2017

The Lemon Twigs - Brothers Of Destruction EP (2017)


  Je vous le rappelle, on a adoré l'album Do Hollywood des Lemon Twigs, tellement qu'on est allés les voir en concert avec Etienne et que je l'ai classé 5e dans mon Top 2016. 

  Après ce tour de force pas si inaugural que ça (un premier album autoproduit était dispo sur youtube avant cette percée, et de nombreuses vidéos montrent les enfants prodiges faire de la musique à différents âges), les deux frères sortent cet EP afin de "clore l'ère Do Hollywood" du groupe et donner corps à quelques chansons qu'ils traînent depuis 2015 et qui n'étaient pas finies au moment de l'enregistrement du LP ou tout simplement n'allaient pas dessus, bien qu'elles en soient proches stylistiquement. Cet EP aurait d'abord dû sortir avant l'album mais le groupe a préféré finir en priorité le LP. Boucler la boucle avant d'aller de l'avant, c'est à dire si on en croit les D'Addario : un album de power pop et un opéra rock avec Todd Rundgren très bientôt, et un album mêlant musique médiévale et classique plus tard. We'll see !

  En attendant, cet EP réjouissant nous fera patienter avec plaisir. La pochette et le titre très série B annoncent la couleur : le projet est autoproduit par les deux frères, avec donc un son plus direct et plus rock que l'album, ce qui lui va très bien. Comme sur le très garage "So Fine" qui pourrait sortir directement des sixties, même s'il a un petit je ne sais quoi de MGMT et Foxygen. De même, l'"Intro" sonne très cabaret façon Kinks, et est un délice du genre qui finit en divagation délirante proche des Mothers Of Invention. Mais même quand on pense à Rundgren, Sagittarius, Brian Wilson, Queen, Traffic, T. Rex, Alex Chilton et aux Bee Gees des débuts sur un même morceau ("Light & Love"), c'est d'abord la forte personnalité et le style inimitable des D'Addario qu'on entend. Ils maîtrisent suffisamment leur rock pour canaliser et utiliser ces influences pour exprimer leur sensibilité unique et leur voix propre.

The Lemon Twigs - Why Didn't You Say That ? (2017)

  Mais ce qui constitue le coeur du projet, c'est d'abord "Why Didn't You Say That ?" merveille de songwriting pop avec une mise en son baroque, qui aurait pu figurer sur le LP qualitativement mais qui est probablement mieux sur cet EP avec cette production plus aérée et relâchée qui lui sied à merveille. Puis "Beautiful", merveilleuse ballade digne du meilleur de McCartney. Et enfin la power pop psychédélique de "Night Time", hyper bien foutue et accrocheuse au possible.

The Lemon Twigs - Night Time (2017)

  En résumé, ce qui pourrait ressembler à un EP de Faces B est un peu plus que ça. Au moins trois ou quatre chansons sont merveilleuses, et les autres oscillent entre le très bon et l'excellentissime. Les Lemon Twigs se devaient donc de les coucher sur bandes, parce qu'elles passent bien en live d'abord, pour le bonheur de leurs admirateurs ensuite, et pour clore un chapitre de leur jeune discographie enfin. C'est donc une sortie bienvenue, indispensable pour le groupe et délicieuse pour ses auditeurs. Gagnant-gagnant, en attendant la suite qui s'annonce passionnante.


Alex

vendredi 20 janvier 2017

Foxygen - Hang (2017)


  Le précédent effort du groupe avait divisé : alors qu'il contenait certaines des chansons les plus intéressantes de la décennie (certes pompées sur Todd Rundgren entre autres mais qu'importe au fond ?), il avait aussi son lot de morceaux bruitistes amorphes et un manque global de direction.

  Ce coup-ci, le projet est plus resséré : une trentaine de minutes, 8 morceaux, et une vraie proposition en termes de son sur tout le long du disque. Ce son, c'est un genre de pop-rock symphonique, avec orchestre à cordes plus des cuivres de partout, un peu comme dans la variété classe d'un Lee Hazlewood, ou chez les Kinks version music-hall, les Four Seasons et le Sinatra de Watertown, le glam de Bowie, Bolan ou Lou Reed (Transformer), les Last Shadow Puppets, Nilsson, ou les géniaux Lemon Twigs (mon 5e album préféré de 2016, produit par Jonathan Rado, moitié de Foxygen). D'ailleurs, on entend l'expérience de producteur de Rado partout, cette musique est riche, ample, le son est divin et les arrangements aussi exquis qu'innombrables. Et même si on reste chez Foxygen, le groupe s'est calmé : moins de tiroirs et de changements de rythme partout dans les chansons.

  Du coup, ça touche en plein dans le mille, la volatilité du groupe mieux canalisée donne des morceaux jamais emmerdants, toujours passionnants et richement produits, mais désormais mieux canalisés. La perte en énergie pure est compensée par le gain en impact. Bon sang, rien qu'à écouter "Follow The Leader" on se demande si y'a vraiment besoin d'écrire d'autres chansons derrière. Même avec ce titre seul sur un CD je suis prêt à lâcher 15 balles pour me l'acheter. 

  Je pourrais dire la même chose d'"America", qui a l'intensité de la variété 60s de qualité et du crossover pop - jazz vocal pour crooner de haute volée (d'ailleurs je tiens à le souligner : Sam France n'a jamais aussi bien chanté que sur ce disque, et diversifie énormément son "flow"). Si le début du morceau est intense, la mélodie qui se pointe à 2' est carrément bouleversante, et la partie qui s'ensuit fait plus penser à du Tchaïkovski suivi d'un peu de Duke Ellington qu'à n'importe quoi d'autre.... Retour du cabaret et fusion de toutes les parties en une conclusion abrutissante tellement elle est belle et puissante. Waow. Rien à dire, je suis soufflé. 

  J'attendais depuis un moment un revival bien foutu de doo-wop, de pop 60s à la Four Seasons, de variété un peu music hall et de jazz vocal à la Sinatra, entre cet album et le Lemon Twigs de 2016 je suis servi.   

  Alors bien sûr, parfois c'est juste bon et pas excellentissime, comme "Avalon" qui commence bien entre piano honky tonk et vaudeville kinksien, et poursuit avec un refrain Beach Boys période Sunflower. Cette chanson n'arrive pas à être plus que la somme de ses parts, mais cette somme est assez bonne pour qu'on lui pardonne aisément. La même théâtralité exagérée est mise à disposition sur "Mrs Adams", mais cette fois-ci l'excellence est atteinte, on n'est plus dans la déconnade mais l'intensité émotionnelle (les leçons de tonton Rundgren ont été bien digérées), et la conclusion est absolument brillante. Je vais vous donner un petit truc pour juger rapidement de la qualité d'un compositeur : écoutez si la conclusion est bonne. Parce que la conclusion ça doit être le truc le plus dur à faire dans une chanson, et elles sont vraiment non seulement pas foirées mais carrément très mémorables ici,  donc les mecs sont vraiment des tueurs. Le diable est dans les détails. Ca n'a rien à voir (quoique si, sinon je n'y aurais pas pensé), mais un proche, cuisinier, m'a un jour donné un conseil semblable pour tester un chef dans un restau : prenez une crème brûlée en dessert. C'est tout con à faire mais ça montre l'attention aux détails et la technique : si le dessus est pas bien caramélisé et chaud tandis que le fond est pas bien pris et froid, c'est que c'est pas un si bon restau que ça. Voilà, fin de la parenthèse. 

  On reprend avec l'album. Dans toute cette chantilly orchestrale, il y a une relative accalmie pour les oreilles délicates : la country-folk champêtre qui ouvre "On Lankershim" (bonne chanson). Mais bon, ça se re-remplit assez vite d'arrangements foisonnants, alors pour les gens sensible, prenez une bonne inspiration. Car le jukebox pop reprend dès la suivante ("Upon A Hill"), où les mélodies se succèdent avec excès et brio (et la voix.... On dirait Iggy non ? C'est très cool en tous cas). Tiens on dirait toujours un peu l'Iguane sur "Trauma", morceau assez dantesque et carrément intense. "Rise Up" conclut ce très bon disque sur une note très Lou Reed. La voix, les cordes.... Ca fait très Transformer tout ça... Mais pas que. Même si il aurait pu pondre ces saillies de guitare bien crado entre 76 et 89. Mais là encore, la musique est tellement riche que si elle évoque des trucs, c'est un peu logique et on est loin de se réduire à un pastiche. 

  Et c'est là où les mecs sont forts. Ca explique qu'ils aient quasiment créé un sous-genre musical à eux tous seuls (avec l'aide du Congratulations de MGMT et d'illustres anciens comme les Flaming Lips quand même), cette pop jukebox ultra moderne dans le fond et ultra vintage sur la forme. Et ça explique que malgré leur jeunesse (1er album en 2012!) ils soient l'un des groupes les plus influents et cruciaux de la décennie. Chapeau les gars.

  Enfin bref, je vais pas m'éterniser davantage : ce disque est vraiment superbement composé et réalisé. Je suis pour ma part totalement conquis, et je vous encourage vivement à l'écouter par vous-mêmes pour vous faire votre propre idée.

A écouter là

Alexandre