Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

samedi 8 avril 2017

Calvin Harris serait-il en train de redevenir bon ? (Slide & Heatstroke, 2017)



  Calvin Harris, c'est un cas d'école. Le mec débarque en 2007 de nulle part (après quelques remixes quand même) et sort I Created Disco, brillant album d'électro-pop bricolée avec des moyens rudimentaires mais soignée, efficace et inventive, tout droit sortie de son PC. Un vrai classique. Il se vautre en 2009 avec l'album suivant, qui contenait encore quelques bonnes chansons, traces survivantes de son génie, mais noyées dans une gelée EDM mainstream assez fadasse. Et depuis, plus rien, encéphalogramme plat. Pas du côté des meilleures ventes, qu'il truste régulièrement, mais du côté de la créativité et de la vie dans ses chansons, devenues génériques, prêtes à consommer et oubliables. Quel gâchis quand on réécoute son premier coup de maître. 



  Et en 2017 (10 ans plus tard!), on ressent enfin un frémissement chez Harris. D'abord avec "Slide". Certes, le morceau use de certains poncifs des tubes de l'été que nous absorbons sans fin : piano émouvant en intro, voix pitchées, et éléments tropical house qu'on nous ressert à la nausée. Mais ici, tout est maîtrisé, et dosé avec parcimonie. Et surtout, le son est chaud, soigné, même sur le fameux sample de piano inaugural. Et puis tout au long du titre, cette disco-pop de studio, tellement bien produite qu'elle transpire la soul discoïfiée d'Off The Wall de Michael Jackson. Et puis il a eu la bonne idée d'offrir le morceau au génie Frank Ocean, qui apporte une nouvelle dimension au morceau grâce à son charme pop iconoclaste et sa soul profonde et expérimentale. Le hip-hop roots des Migos achève de rendre ce morceau authentique, et mélodique à la fois (et moderne aussi grâce à l'autotune). Et puis rendons à César ce qui est à César : la prod est simple et laisse l'espace au chant, mais cette basse ronde, ces guitares étouffées et triturées, ces claps en échos.... Tout celà est très bon. Une vraie grande chanson pop, pas dans le sens Beatles du terme, mais dans le sens Michael Jackson / disco-pop / soft rock.... En bref, un tube imparable et intemporel. C'est un peu ce que les Daft Punk auraient pu faire de Random Access Memories si ils n'avaient pas eu cette fixette vintage (ceci s'applique au prochain morceau également), et c'est absolument brillant.




  Ce coup-là, on aurait pu penser qu'il ne serait qu'isolé, dû au seul génie de Frank Ocean (et Migos dans une moindre mesure) qui transcenderait le morceau. Mais c'était sous estimer Calvin Harris, qui a eu le bon goût de suivre ce morceau d'un "Heatstroke" tout aussi bon. Au passage, les artworks des deux singles sont très beaux et classes. Sur un tapis de claviers soul jazzy qu'on imagine joués par Pharrell Williams (ce qui est confirmé par les crédits), et avec de discrètes et élégantes percussions, Young Thug déroule son flow iconoclaste, utilisé ici comme chez Kanye West, dans un mode gospel/soul qui lui sied à merveille, comme un crooner soul de l'an 3000 (quelque part entre Al Green et Bobby Womack). Puis la basse fait son entrée, suivie du beat et des guitares, et là chanson se déploie dans toute sa luxuriance rétro-moderniste, avec même quelques percus reggae, un refrain aux choeurs jazzy by Pharrell himself, et un pont par une Ariana Grande très classe en diva néo-soul. C'est très moderne, c'est électronique, c'est hip-hop, mais c'est en même temps ce sommet de soul-pop intemporel... Là encore, l'utilisation très juste d'artistes avec un pied dans le mainstream et un vrai talent (Grande, Williams) et d'outsiders assez avant-gardistes dans leur genre (Thugger ici, Ocean sur "Slide"), associés à une prod ambitieuse, accessible et chaude porte ses fruits. 



  Bref, j'aurais jamais cru dire ça mais je suis hype pour le prochain Calvin Harris. Si tout est aussi bien foutu que sur ces deux titres, le gars va dominer toute la saison chaude, et ce sera mérité. Et si il pouvait renvoyer aux oubliettes de l'histoire tous les idiots utiles du genre type Bruno Mars, ça serait rendre un immense service à l'humanité. On peut avoir peur que l'exploit ne soit pas renouvelé sur une plus longue durée, mais Harris a prouvé qu'il savait faire des (enfin, un) album excellent de bout en bout, et qu'il était plein de surprises en ce moment. 
  Bravo à Calvin Harris, on avait des raisons de douter quand même (faut pas exagérer), mais il a toujours la flamme, chapeau !

Alex


2 commentaires:

  1. J'attends (??) aevc impatience (!!) ta/votre chronique sur le dernier Timber Timbre. Moi mon opinion est faite (je me l'écoute du dernier au premier titre... va savoir pourquoi) Pour le Calvin, je me dis si un sourd pouvait lire tes chroniques (comme pour pascal georges) il pourrait quand même se faire une bonne idée, même si frustrante l'idée. Bien vu le Calvin. J'ai un peu tiqué sur le "(quelque part entre Al Green et Bobby Womack)" et c'est cause de ça que je me suis repassé le titre, mais bon, l'accroche était un peu... hum ... faut pas me faire des coups comme ça ;-) Le printemps est a peine commencé que notre Alex s'y voit déjà, été...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pas encore réellement écouté le Timber Timbre, à peine survolé. Y'a un truc de soulman étrange et autotuné qui me plaît, d'où la description.
      Dans l'ensemble je trouve génial que ces deux titres aussi mainstream et produits soient au final aussi bons et profonds, ça emmerde les snobs et ça amène les gens qui écoutent de la musique juste comme ça vers quelque chose de plus intéressant.
      Merci pour ton commentaire en tous cas c'est sympa !
      C'est vrai que tout ça est très estival ;)
      À+

      Supprimer