Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

lundi 11 septembre 2017

The Drums - Abysmal Thoughts (2017)


  Je ne suis en général pas partisan du fait de lire les interview des artistes avant d'appréhender leur art, on a parfois trop d'explications qui désacralisent et démystifient trop la chose en y accolant des situations trop précises ou trop personnelles. Mais dans le cas de Jonny Pierce, seul membre encore à bord de The Drums, c'est tout l'inverse. A chaque album, ses anecdotes personnelles enrichissent sa musique. Il faut dire que le gars a du background : gay élevé dans une secte ultra de chez ultra (et chez les chrétiens US, y'en a des bien tarés), quitté successivement par deux piliers du groupe et amis très proches, ayant subi un divorce, il en a vécu des trucs. Et c'est toujours cette pop de fuite en avant, lumineuse et fragile dans un environnement sombre et oppressant, qu'il met en avant dans ce qui est désormais son projet solo. Pourtant, le son du groupe est inchangé, il est même radicalement moins électronique que sur ses merveilleux singles solo et sur les deux derniers disques (Encyclopedia surtout). 

  Les guitares post-punk et le chant accrocheur de Pierce guident l'auditeur dans les soubresauts rythmiques hérités des 80's, de Joy Division aux Chameleons en passant par Gang Of Four, The Jesus & Mary Chain, les Cure et toute la scène mancunienne. Et c'est la recette gagnante des trois premiers morceaux du disques, sublimés par la voix et le songwriting impeccables de Jonny : "Mirror", et "I'll Fight For Your Life", à la rythmique sèche quasi country et aux touches électroniques plus audibles, qui caractérisent bien la fuite en avant dont je parlais, et "Blood Under My Belt", digne successeur aux tubes "Let's Go Surfing" et "Money".

  Les guitares retrouvent à nouveau ce son plus américain, un poil country/folk, sur "Heart Basel", sous la pulsion coldwave intacte, ainsi que sur "Shoot The Sun Down" où l'aspect synthétique renforce la comparaison avec des groupes comme les Horrors et le Joy Division tardif, et enrichit le son d'une manière dramatique et bienvenue. Des ouvertures, il y en a aussi sur la new wave revisitée façon dub de "Head Of The Horse", sur le mid-tempo "Are U Fucked" à la limite de la dissonance et à la variation de rythme appréciable et théâtrale, dans les synthés marrants de "Rich Kids", ou sur la très étrangement mixée "Your Tenderness" aux accents électro aquatique et jazz easy listening façon Sting. Il y a même une chanson folk, "If All We Share (Means Nothing)", entre Sufjan Stevens, Panda Bear et Joni Mitchell. Et grâce à ces petites touches, même si le son reste très homogène, et si les chansons peuvent se ressembler pour une oreille non avertie, les hooks de chaque morceau, même sur les morceaux plus classiquement post-punk à guitares comme "Under The Ice" ou "Abysmal Thoughts" (qui a quand même des accents africains), sont uniques et mémorables, chacun à leur façon, derrière ces saccades rythmiques propulsives. Et chacun est indispensable à faire de cet album une grande réussite pop et rock.

  Je vous conseille donc vivement l'écoute de cette perle, impeccable de bout en bout, de la part d'un des meilleurs groupes de ces dix dernières années, et l'un des rares à savoir faire de la qualité guitare en main et à rameuter des jeunes en même temps avec une musique aussi personnelle. A écouter ici.

Alex

2 commentaires:

  1. Sur le titre homonyme Abysmal Thoughts, je trouve même un petit côté Arcade Fire (dans les choeurs peut-être) que je ne m'explique pas.
    Pas écouté l'album en entier, mais peut-être devrais-je le faire.
    J'ai juste envie de sortir une boutade, mais si ses deux meilleurs potes et sa femme l'ont lâché en même temps, on peut se dire d'une part qu'il a pas de bol, mais on peut aussi considérer l'hypothèse selon laquelle ce type est imbuvable, non =) ?

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    1. Haha c'est possible en effet ! Ça laisse le background "enfant qui grandit dans une secte ultra chrétienne" et le bonus "en étant gay" quand même niveau contexte pas évident !
      Pour le coup le 1er (guitariste) est parti pour vivre une vie plus simple, il ne supportait pas le showbiz et le rythme des tournées, c'est pas forcément "de sa faute". Le dernier est parti parce qu'il voulait faire des trucs en solo, en tant que claviériste il tendait plus vers la synthpop (il a sorti un album avec un groupe totalement synthetique cette année, j'ai plus le nom en tête là).

      Pour AF j'entends ce que tu veux dire !

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