Timber Timbre à Stereolux, Nantes, le 10/10/17
Ça faisait un moment qu'on hésitait, et puis on a foncé. Etienne parce qu'il avait encore des souvenirs émus de Hot Dreams, moi parce que j'ai adoré le petit dernier, ce Sincerely, Future Pollution de cette année dont j'ai déjà dit le plus grand bien ici. Et nous sommes donc allés voir les canadiens Timber Timbre en concert.
Mais nous avons d'abord eu le plaisir d'entendre en solo le britannique Chris Bundy, qui est le saxophoniste officiant pour le groupe, pour la première partie. Son set, étonnant, était très free jazz dans l'esprit. La plupart du temps seul avec son saxophone basse au son puissant et riche, il était parfois accompagné de bandes. Et on avait du mal à imaginer la tête de ses partitions tant ce qu'il jouait était complexe et davantage dans l'interprétation que dans les notes. On naviguait entre dissonances free, passages plus cool façon jazz 80's, expérimentations poussées à l’extrême et complexité mélodique issues du classique contemporain, et ouvertures vers l'art brut (son saxo sonnait parfois comme un didgeridoo, et le son de son souffle ainsi que le cliquetis de ses doigts faisaient partie intégrante de la musique, surtout pour nous, proches de la scène). Très puissant, intriguant et intéressant, et parfait pour instaurer une ambiance mystique, grave et dense avant l'arrivée de Timber Timbre. Et assez inhabituel comme ouverture pour un concert de rock indé (le côté alien étant renforcé par la dégaine de ce grand mec fin tiré à 4 épingles entre BCBG 50's et membre de Kraftwerk, accompagné de son énorme saxo), mais ça a bien plu, la salle très réceptive l'a applaudi plus que chaleureusement et l'a acclamé à chaque retour sur scène avec le groupe. Comme quoi, les gens sont loin d'être aussi limités dans leurs goûts que ce que les majors veulent bien croire.
Christopher "Chris" Bundy en solo
Puis le groupe a débarqué, quasiment dans le noir, en jouant l'instrumental "Sincerely, Future Pollution", à la lente mise en place entre cold-wave et krautrock propulsée par la basse puissante du leader Taylor Kirk. Avant d'enchaîner sur une première partie faisant la part belle au superbe dernier album avec "Sewer Blues" puis "Velvet Gloves And Spirit" et la très nickcavienne "Moment". Toutes plus intenses et plus rock en live que sur disque. Portées par la voix toujours impeccable et profonde de Kirk, qui jure presque avec son physique de père de famille américain moyen, mais pas avec sa dégaine classic rock. C'est lui le leader du groupe en tous cas, pas de doute. Qu'il ait une basse en main ou une guitare (divin à la basse, il échangeait cependant souvent de rôle avec le guitariste selon les morceaux), son jeu musculeux, précis et implacable prenait l'ascendant sur toute la formation. On sentait un perfectionnisme dans chaque réglage sonore, aspect sur lequel il prenait bien son temps, et le résultat était là : sa basse, surtout, ne sonne comme personne. Tantôt ultra-puissante mais classique, tantôt alien, sonnant comme tout sauf une bête basse, truffées d'échos et de reverb, elle était toujours au coeur du live. Tandis que ses acolytes tricotaient des embellissement à la guitare, bidouillaient des nappes dissonantes pour ajouter à l'ambiance psychédélique au synthé ou martelaient des rythmes simples sur lesquels se caler à la batterie.
Chris Bundy & Timber Timbre sur "Hot Dreams"
D'autre part, le groupe devrait réellement engager Chris Bundy comme 5e membre tant ses interventions étaient un énorme apport à chaque fois qu'il se montrait sur un morceau (et heureusement ça arrivait souvent). Sur l'obligatoire final de "Hot Dreams" évidemment, satisfaisant à l'extrêmes pour nos oreilles de petits fans, mais également tout au long du concert.
Du dernier LP, on aura notamment eu le droit à une interprétation hantée de "Western Questions", et à une version de "Grifting" encore plus Stevie Wonder en concert que sur disque. De Hot Dreams, on retiendra la psychédélique "Curtains!?". Et les premiers morceaux plus lo-fi du groupe prennent vraiment une nouvelle dimension avec la voix plus assurée et pleine de Kirk, qui vieillit magnifiquement.
Après deux rappels ovationnés, un public conquis et un Taylor Kirk ému jusqu'à avoir les yeux humides, le groupe nous a quittés, sans doute avec le plaisir du travail bien fait (sans jouer ma chouchoute, "Floating Cathedral", à mon grand regret, mais ce sera pour une prochaine fois). Bref, un extraordinaire concert que je suis heureux d'avoir pu partager avec mon poto Etienne.
Setlist approximative
(ils ont joué des trucs en plus en rappel)
Alexandre
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire