Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes
Affichage des articles dont le libellé est Psychobilly. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Psychobilly. Afficher tous les articles

mercredi 28 novembre 2018

Sealings - Scum / The Sound Of Music (2018)


  Après I'm A Bastard (2015), que j'avais adoré (et même classé parmi mes albums préférés de l'année), les anglais Sealings reviennent avec la même intensité sur un SCUM / THE SOUND OF MUSIC (sorti chez GOB Nation, label punk basé à Brighton) qui se révèle largement à la hauteur de son pourtant parfait prédécesseur. 

  Guitares bruitistes, basse grondante, boîtes à rythme, bruit blanc, chant d'outre tombe, post-punk, rock gothique, soupçons de glam dévoyés, indus sans concessions : ce cocktail sombre est magnifié par un génie de la dramaturgie certain ("Asda" pose l'ambiance crépusculaire d'entrée de jeu), et par un sens des gimmicks obsédants incontestable (la psyché "Sports", avec un synthé/orgue bien dark). On a même quelques échos d'une synthpop rudimentaire, proche de Suicide et du plus sombre de Depeche Mode, avec de petites touches de The Cure et plus récemment The Horrors ("Having A Dream"), même si là encore une guitare viscérale vient pervertir le tout comme chez les Cramps.

Sealings - Sports (Clip, 2018)

  Ce côté psyché, façon Black Angels également dans l'utilisation de la répétition et d'une esthétique sombre et plombée, donne un certain relief aux morceaux, et une certaine intemporalité, une profondeur, une patine que la plupart des disques n'acquièrent qu'avec deux ou trois décennies dans les pattes ("Charnel Ground"). Et cette alternance entre titres lents et graves (tels "Hanger Lane" et "Charnel Ground") et rythmiques ultra rapides davantage indus (comme "No Telephones" ou "Church") contribue à la construction très efficace de l'album. On notera également sur ces chansons que le groupe, loin d'être seulement un enfant de la post-punk gothique, est plutôt un grand esthète de la pop et du rock de manière générale, avec de petites allusions à des motifs surf, western ou rockabilly jouée par les guitares. 

  En tous cas, l'urgence est toujours là (lancinante "No Justice In The Streets", qui se sert de la synthpop comme base rythmique à un tourbillon de rock psyché agressif comme chez La Femme des débuts) et ne redescend pas tout au cours de l'album. On atteint même des sommets presque Stooges sur un titre comme "Leisure", free punk incontrôlable, sauvage et défouloir mais extrêmement bossé tout de même, sur lequel on ressent l'énergie du live. 

  Dans sa construction, ses sonorités noires, intransigeantes et fidèles à l'esprit post punk/gothique/indus du groupe, ou son exécution vigoureuse, la musique de Sealings est toujours excellente, et ce disque est le digne successeur à la claque de 2015 (I'm A Bastard). 

Mes morceaux préférés : Sports, Having A Dream


Alex



  

dimanche 5 février 2017

Laurent Voulzy - Le Coeur Grenadine (1979)


  Cette semaine, la pop française est à l'honneur avec un classique du genre par jour jusqu'à dimanche. Des disques qui nous tiennent particulièrement à cœur et que nous considérons comme des classiques indépassables dans leurs genres respectifs.

  Bon, là on attaque du sérieux : le premier LP de Laurent Voulzy, sorti en 1979. Et si ce disque est assez peu cité, c'est une honte, car c'est à mon humble avis rien de moins qu'un des meilleurs disques de pop francophone (et j'irais même plus loin en disant de pop tout court) de tous les temps. Rien que ça, ouais. 

  Comment ne pas succomber à la mélancolie délicate du single "Le coeur grenadine", sa rythmique riche augmentée par une basse impeccable, sa guitare tire-larmes, ses cordes subtiles et ses synthés discrets. Et puis ce chant aussi naïf que touchant, à l'image du texte. De l'intro à la conclusion, Voulzy prend le temps de déployer ce titre, lui laisse l'espace nécessaire pour le faire s'épanouir, avec une musicalité inattaquable. Et le résultat, c'est que des premières secondes aux dernières, cette chanson a un souffle, un petit truc en plus, la marque des classiques instantanés. 

  La suite est aussi riche et variée qu'excellente. On a la pop-rock de "Hé! P'tite Blonde" compense son texte daté par un travail d'équilibre assez rare entre pop synthétique colorée et guitare nerveuse à ranger du côté du psychobilly plutôt que de la guimauve. Oh, et la romance aux choeurs sublimes et au cool jazzy de "Karin Redinger", avec pour le coup un texte très sympa et un chant merveilleux. Encore un classique. Comme "Grimaud", funky et émouvante à la fois, et dotée d'un rythme chaloupé d'une classe jamais égalée en métropole, et "Lucienne est américaine", pop-rock au son unique et au riff d'une violence inédite (mais relative) chez Voulzy.

  Comme aussi "En tini", où les origines guadeloupéennes de Voulzy et les musiques qu'écoutait sa mère ressortent de façon plus voyante (salsa, calypso, merengue, conga, reggae), pour un résultat absolument mémorable. On a une rythmique disco-pop là aussi complexifiée par des percussions antillaises sur la reprise du "Qui Est In Qui est Out" de Gainsbourg, habilement habillée de guitares et de synthés assez Blondie. On ne le dira jamais assez : le talent de mélodiste hors norme de Voulzy n'a d'égale que sa science des arrangements divins. Ça accouche d'un son très personnel, et vous n'entendrez jamais rien qui sonne comme ce Coeur Grenadine.  

  La classe inégalable du "Coeur Grenadine" est finalement égalée sur "Cocktail Chez Mademoiselle", où Voulzy se fait séducteur et joue sur l'interprétation dans le chant de façon assez incroyable, sur une musique aussi sexy que délicate et avec un texte mémorable. Un exemple de perfection pop assez indiscutable.

  Bref, on a sans aucun doute (en tous cas pour moi) un des meilleurs albums francophones (et tout court) de tous les temps, probablement le meilleur de Voulzy (ce qui est un sacré compliment), et donc un indispensable inégalé dans son genre, que vous vous devez, sinon de le posséder, au moins de l'avoir écouté dans de bonnes conditions (par exemple par ici). Dites m'en des nouvelles !

Alex