After Hours a la lourde tache de succéder à une salve dévastatrice d'albums ayant placé The Weeknd au sommet de la pop mondiale. Pourtant, c'est davantage dans la continuité de l'EP sombre, glacial, mature, pensif et désabusé My Dear Melancholy, de 2018, qu'il se situe.
The Weeknd - Alone Again (Clip, 2020)
A la production, on retrouve une équipe aussi hétéroclite que talentueuse, comprenant l'électronicien expérimentateur Daniel Lopatin (Oneohtrix Point Never), le fidèle Illangelo, le produteur superstar de la pop mainstream Max Martin, le génie trap Metro Boomin, et la rockstar Kevin Parker (Tame Impala), donnant à cet album une riche palette sonore. La direction musicale surprend pourtant, écartelée entre 4 axes très divers : la synthpop 80's, l'électro british 90's façon UK garage, la trap US, et le style du Weeknd des débuts, sorte de rnb alternatif léthargique, froid et brumeux.
The Weeknd - Scared To Live (Live, 2020)
On se retrouve de premier abord avec une majorité de ballades tristes, toutes superbes, comme "Too Late", "Escape From LA" et "Snowchild" à l'orientation alt-rnb, la cathartique "Scared To Live", très premier degré façon Phil Collins, Lionel Richie ou Billy Ocean, ou la magnifique "Alone Again", dont la mélancolie digitale sous arpèges synthétique est transcendée par un glorieux beat trap, des basses épiques et des modulations vocales irréelles. L'électro à l'ancienne, un peu british, déjà explorée sur Starboy, se retrouve sur "Hardest To Love".
The Weeknd - Blinding Lights (Clip, 2020)
En 2e partie d'album, les mélodies se font plus insistantes et le rythme s'accélère, les tubes (synth)pop ("Blinding Lights", "Save Your Tears", "In Your Eyes" néo-italo disco qui a droit à saxo et trompettes), trap ("Heartless"), ou les morceaux de bravoure inclassables ("Faith") pleuvent.
The Weeknd - Faith (Clip, 2020)
Et puis à la toute fin, ça retombe, on part dans une série de morceaux contemplatifs ("Repeat After Me (Interlude)"), sombre et introspectifs ("After Hours", "Until I Bleed Out"), pour un final émouvant, et tout simplement beau. L'album est vraiment transcendé par une construction géniale en crescendo : de lancinantes ballades vers une musique plus dansante, pour redescendre au final ; le tout avec des transitions impeccables entre des morceaux qui se complètent et gagnent vraiment à être écoutés ensemble, enfin à la suite les uns des autres. C'est un vrai album, dans le sens classique -et noble du terme- une oeuvre qui vaut plus que la somme de ses parties.
The Weeknd - After Hours (Clip, 2020)
Mine de rien, avec ce mélange étonnant, Abel Tesfaye est loin d'avoir choisi la facilité, alors qu'il aurait pu se contenter de tubes pop formatés et remporter la mise. L'intégrité et l'homogénéité de l'album malgré les influences disparates, ainsi que le soin apporté aux détails (la production est monstrueuse) ne trompent pas : on a là affaire à un artiste qui ne lâche rien et continue à pousser ses limites avec intransigeance.
C'est d'ailleurs assez inspirant de suivre la discographie de The Weeknd, qui est devenu mine de rien une des plus grosses popstars du monde (cf ses chiffres de ventes, le nombre de festivals avec son nom en tête d'affiche), tout en gardant une vraie intégrité et un développement musical inattendu, et sans tomber dans la marchandisation de sa vie privée. Et mine de rien, l'influence de son rnb sombre sur la musique populaire, depuis ses premières mixtapes, a été un des marqueurs sonores de la décennie passée, dont il a contribué à enrichir et pervertir le son, tout en montant en puissance sans jamais rien lâcher à sa singularité. Preuve que lorsqu'on laisse le public juger et qu'on lui propose des œuvres intéressantes et uniques, il ne s'y trompe pas et que les maisons de disques pourraient se permettre quelques risques et nous épargner le robinet d'eau tiède standardisé qu'elles pensent devoir laisser couler en permanence pour faire du pognon. On y gagnerait tous.
En attendant, The Weeknd, à peine 30 ans cette année, risque de nous fasciner encore longtemps tant le champ d'exploration artistique semble infini devant lui, et le temps, les moyens financiers, l'adhésion du grand public et la créativité ne semblant pas lui faire défaut. Et c'est assez excitant à vivre en temps réel.
C'est d'ailleurs assez inspirant de suivre la discographie de The Weeknd, qui est devenu mine de rien une des plus grosses popstars du monde (cf ses chiffres de ventes, le nombre de festivals avec son nom en tête d'affiche), tout en gardant une vraie intégrité et un développement musical inattendu, et sans tomber dans la marchandisation de sa vie privée. Et mine de rien, l'influence de son rnb sombre sur la musique populaire, depuis ses premières mixtapes, a été un des marqueurs sonores de la décennie passée, dont il a contribué à enrichir et pervertir le son, tout en montant en puissance sans jamais rien lâcher à sa singularité. Preuve que lorsqu'on laisse le public juger et qu'on lui propose des œuvres intéressantes et uniques, il ne s'y trompe pas et que les maisons de disques pourraient se permettre quelques risques et nous épargner le robinet d'eau tiède standardisé qu'elles pensent devoir laisser couler en permanence pour faire du pognon. On y gagnerait tous.
En attendant, The Weeknd, à peine 30 ans cette année, risque de nous fasciner encore longtemps tant le champ d'exploration artistique semble infini devant lui, et le temps, les moyens financiers, l'adhésion du grand public et la créativité ne semblant pas lui faire défaut. Et c'est assez excitant à vivre en temps réel.
Mes morceaux préférés : Scared To Live, Alone Again, Heartless, Faith, Blinding Lights, In Your Eyes, Save Your Tears, After Hours, Repeat After Me (Interlude)
Alex
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