Who Is It ? est une nouvelle rubrique de ce blog, consistant à présenter (en français et en anglais) un artiste méconnu ou mésestimé et à le faire découvrir à nos lecteurs. Pour cette première édition, nous vous présentons de façon chronologique la discographie du jeune compositeur britannique Oliver Buckland, dont les oeuvres oscillent entre une musique classique résolument moderne et une électronique décomplexée.
Les débuts électroniques (2013-2014)
Dans les premières oeuvres, l'électro la plus cérébrale des années 2000 côtoie les influences classiques, depuis l'IDM très Autechre de "Glitch Test" (2013), premier morceau posté sur soundcloud, à la musique classique glitchée façon Wendy Carlos reprenant Bach sur Warp de "Distorsion" en passant par "irregular-blips", croisement entre les ambiances les plus mélodiques et apaisées d'Aphex Twin et une électronique plus rythmée et cheesy aux ambitions populaires. Les samples de jazz vocal côtoient les bleeps, l'ambient industrielle et les beats hip-hop sur le très bon premier long format Bodies, très mélancolique.
Après cette période très électronique, l'irruption du piano dans les beats concassés de "cloudburst" apporte une profondeur nostalgique et un côté organique au morceau, le rapprochant des oeuvres de Thom Yorke en solo. L'ambient pure de "Mall Ambience" fascine, envoûte et obsède. Celle, plus rythmée de "irregular_triplets" et des morceaux sortis à la même période intrigue elle aussi, malgré les sons un peu cheap et des structures plus prévisibles. Cette accessibilité est palpable sur "minutiae", qui pencherait presque vers l'électro-pop ; cette dernière partage en effet une ambiance commune avec l'instrumental "Country" des australiens d'Empire Of The Sun. L'art du hachage de beats est poussé à son paroxysme sur "Manual Stuttering". Au sein des nombreuses expérimentations de l'époque, des titres surnagent, comme "bleak", qui mêle ampleur orchestrale, piano, électro et samples de voix jazz plein de soul.
En transition : l'ampleur de l'acoustique (2014 - 2015)
L'irruption d'une orchestration acoustique sur "sanctum" donne une nouvelle ampleur à la musique de Buckland, rendant cependant le sound design et la programmation un peu fades en comparaison de la maîtrise de l'ampleur du morceau et de la qualité de la composition et des arrangements organiques. Cette distanciation vis-à-vis d'une orchestration purement électronique (relative, cf le très fun "completely serious piece") passe par des reprises, de morceaux classiques mais pas seulement, mais on y reviendra. tout d'abord, sa reprise du "Polichinelle" de Rachmaninov est une merveille de piano, son interprétation me touche énormément. La "Sarabande - Pour le Piano" de Debussy est également le moyen pour Buckland de démontrer toute la sensibilité et l'expressivité de son jeu. Enfin, de façon plus étonnante, sa reprise de la pop-song "Why Do You Let Me Stay Here" de She & Him, est ravissante.
Quant à la très classique "Cascada", qui pousse le côté acoustique plus loin, elle m'émerveille particulièrement par sa mélodie immédiatement reconnaissable, rappelant les premiers films de Walt Disney, et ses arrangements inventifs (flûtes, xylo, dissonance...).
La maturité du style Buckland (2014-2017)
Puis Oliver Buckland se lance dans les longs formats, avec l'inaugural Ten, premier album composé de dix titres aux sonorités électroniques amples (cf "before"), rythmées, jouant avec des samples vintages ("glide & survey"). Sa musique y est toujours aussi mélodiques, drôles et mélancoliques (la magnifique "rapid_data_transfer", la poignante et très 80s "incision"), lorgnant parfois sur une forme d'ambient pop à la composition très classique et au rendu cinématographique ("nightspread"). Le sound design et la production sont nettement plus fins que par le passé, comme en témoigne le son clair, riche et pur de la technoïde "cryptocristalline".
Cet album est prolongé par Twenty, encore plus abouti, comportant de petits chef-d’œuvres électro-pop composées avec ce savoir-faire classique et une vraie science des arrangements et de la prod, comme la géniale "unknown", entre minimalisme, synthpop, vaporwave et dub. Cet album est très accessible, les mélodies, comme celles de "mono" ou de la new wave modernisée et classicisée de "the inside of tears" collent au fond de l'oreille pour ne plus s'en déloger. Il s'y autorise une utilisation de synthés WTF pour un morceau classique très Wendy Carlos sur "icosa", et une géniale divagation presque Mr Oizo dans l'esprit avec "Microchip", très fun. Et il a l'audace de la faire suivre par un morceau aussi beau et pur que "infirmary".
Mais en dehors des albums, les EP donnent à écouter d'autres facettes de la musique de Buckland. Le court projet muzak est très intéressant, purement vaporwave dans la démarche, il est également très réussi sur la forme, avec des morceaux remarquables comme "stygia", "VHS Obituary" qui lorgne sur une version remixée de la new wave, ou l'ambient-pop inquiétante et viscérale de "drifting" et "NIGHT MALL".
De même, l'EP This New Sea mêle de façon mûrie et maîtrisée samples, musique classique (choeurs et instrumentation) avec les autres courants précédemment abordés.
Certains morceaux isolés de cette période sont également remarquable, comme les deux morceaux au titre difficile à écrire présents là et là, ou l'intense "Monolith", basé sur un jeu de piano virtuose et émouvant, ainsi que l'orchestral "ICOSIKAITERA", lorgnant sur la musique de films, comme l'ample "scale". Ou la déchirante composition pour violons "Slant" et l'ambigüe et printanière "CYCLE", un de mes morceaux préférés du compositeur. Les reprises sont également de la partie, avec une version très personnelle, guillerette et grinçante à la fois, du "King For A Day" de Dave Brubeck. Et puis on a les parenthèses marrantes de "livestock auctioneers have surprising rythm", qu'on aurait pu inclure dans notre Dossier de la Pop humoristique sur l'électro-country, le délire choral "Saint Waitrose", ou le très cool "Pinkover", qui sonne comme un mix de French Touch façon Oizo et de piano honky tonk sur une rythmique quasi hip-hop, avec toujours ces arpèges classiques. Et puis on a bien sur le grandiose et indispensable "Pendent", dont Etienne vous a à merveille parlé ici.
En espérant que ce survol de la discographie de Buckland vous ait convaincu d'aller faire un tour sur son soundcloud y découvrir quelques merveilles, je vous annonce d'ores et déjà que nous avons pu interviewer l'artiste, pour ce qui constituera la première interview sur notre blog, et que celle-ci sera bientôt disponible ici.
A bientôt donc !
Lien vers le soundcloud d'Oliver Buckland
Cet album est prolongé par Twenty, encore plus abouti, comportant de petits chef-d’œuvres électro-pop composées avec ce savoir-faire classique et une vraie science des arrangements et de la prod, comme la géniale "unknown", entre minimalisme, synthpop, vaporwave et dub. Cet album est très accessible, les mélodies, comme celles de "mono" ou de la new wave modernisée et classicisée de "the inside of tears" collent au fond de l'oreille pour ne plus s'en déloger. Il s'y autorise une utilisation de synthés WTF pour un morceau classique très Wendy Carlos sur "icosa", et une géniale divagation presque Mr Oizo dans l'esprit avec "Microchip", très fun. Et il a l'audace de la faire suivre par un morceau aussi beau et pur que "infirmary".
Mais en dehors des albums, les EP donnent à écouter d'autres facettes de la musique de Buckland. Le court projet muzak est très intéressant, purement vaporwave dans la démarche, il est également très réussi sur la forme, avec des morceaux remarquables comme "stygia", "VHS Obituary" qui lorgne sur une version remixée de la new wave, ou l'ambient-pop inquiétante et viscérale de "drifting" et "NIGHT MALL".
De même, l'EP This New Sea mêle de façon mûrie et maîtrisée samples, musique classique (choeurs et instrumentation) avec les autres courants précédemment abordés.
Certains morceaux isolés de cette période sont également remarquable, comme les deux morceaux au titre difficile à écrire présents là et là, ou l'intense "Monolith", basé sur un jeu de piano virtuose et émouvant, ainsi que l'orchestral "ICOSIKAITERA", lorgnant sur la musique de films, comme l'ample "scale". Ou la déchirante composition pour violons "Slant" et l'ambigüe et printanière "CYCLE", un de mes morceaux préférés du compositeur. Les reprises sont également de la partie, avec une version très personnelle, guillerette et grinçante à la fois, du "King For A Day" de Dave Brubeck. Et puis on a les parenthèses marrantes de "livestock auctioneers have surprising rythm", qu'on aurait pu inclure dans notre Dossier de la Pop humoristique sur l'électro-country, le délire choral "Saint Waitrose", ou le très cool "Pinkover", qui sonne comme un mix de French Touch façon Oizo et de piano honky tonk sur une rythmique quasi hip-hop, avec toujours ces arpèges classiques. Et puis on a bien sur le grandiose et indispensable "Pendent", dont Etienne vous a à merveille parlé ici.
En espérant que ce survol de la discographie de Buckland vous ait convaincu d'aller faire un tour sur son soundcloud y découvrir quelques merveilles, je vous annonce d'ores et déjà que nous avons pu interviewer l'artiste, pour ce qui constituera la première interview sur notre blog, et que celle-ci sera bientôt disponible ici.
A bientôt donc !
Lien vers le soundcloud d'Oliver Buckland
Alex
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