Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

samedi 5 mai 2018

Brazilian Girls - Let's Make Love (2018)


  Brazilian Girls est un groupe que j'apprécie énormément. New-yorkais, formé en 2003 par Jesse Murphy (basse, chant), Didi Gutman (claviers, chant), Aaron Johnston (batterie, percussion, chant), autour de la patronne, Sabina Sciubba (chant principal, électronique), ils ont à l'époque fait leurs armes en jouant toutes les semaines au Nublu, un club au sein duquel ils ont forgé leur son à force de lives libres et en partie improvisés. Ils ont déjà 3 albums à leur actif, Brazilian Girls (2005), Talk To la Bomb (2006), et NYC (2008), que je considère comme un classique personnel, un disque de chevet. Avec un chant polyglotte, une boss flamboyante et charismatique, et une musique électro-pop/électro-rock très ouverte également sur le plan des influences, difficile de catégoriser le groupe, qui a toujours été assez sous-estimé et est trop rarement cité malgré son immense qualité.

Brazilian Girls, 2018

  Après quelques projets solo, et 10 ans après le dernier album, les revoilà en 2018 sur le label Six Degrees Records avec un Let's Make Love produit par leur collaborateur de toujours Frederik Rubens, abouti à la suite de nombreuses sessions à Istanbul, Paris, Madrid et New-York, et enregistré sur plusieurs années. Les sessions se sont passées très naturellement, le groupe retrouvant instantanément son alchimie même après des années sans jouer ensemble, et ça se sent sur ce disque solaire. Ce qui aide aussi, c'est ce thème de l'amour et du sexe qui irrigue le disque, dès son titre, et qui informe les paroles de "Pirates", irrésistible single new wave qui ouvre le disque et propose aux gens de faire davantage l'amour sur une musique entre Blondie, Nena et nu-rave. La mélodie irrésistible du titre, et ce chant si personnel de Sciubba, le son du groupe, tout cela ne peut que faire le bonheur d'un admirateur comme moi, le groupe ayant renoué instantanément, comme par magie, avec le sommet de sa forme. Le disque aurait pu sortir il y a dix ans tant le style est reconnaissable, pourtant il sonne foncièrement moderne. Peut-être en partie parce que les Brazilian Girls ont toujours eu deux coups d'avance sur la pop de leur époque, ce qui est leur grande force et peut-être également leur malédiction. 

Brazilian Girls - Pirates (Clip, 2018)

  Avec une pulsation sixties, "Go Out More Often" éclabousse de sa lumière, entre choeurs angéliques, basse ronde et guitares rêches et mécaniques. Ce titre évoque avec brio la chaleur excitante de l'été qui approche. Comme le languide et moite reggae-soul de "Salve", ou le funk caribéen de "Balla Balla", ou la pop balnéaire de "Karaköy", qui aurait pu s'échapper de Happy Soup (2011) de Baxter Dury (avec un petit refrain Bruce Springsteen 80's quand même). Le jazz doucereux, rythmé et vaguement bossa, de "The Critic", émerveille avec ses touches de rockabilly dans le chant et ses claviers atmosphériques improbables dans cette ambiance. Une merveille. Qui apaise presque autant que la douce "Sunny Days", qui donne envie de chiller au bord d'une piscine, écrasé par un soleil de plomb. 


  L'électro-funk de "Wild Wild Web" hésite entre Talking Heads et William Onyeabor, avec des claviers fous, une basse pulsatile et un rythme post-punk obsédant, mettant en lumière le chant désabusé de Sciubba qui là encore dans le thème technophobe, paranoïaque et dans le chanté-parlé rejoint l'esthétique de David Byrne. La quasi-house "We Stopped" est un petit cran en dessous mais reste très kiffante dans son genre hédoniste et possède un génial solo d'orgue, bien barré. Et l'électro-rock de "Let's Make Love", très post-punk, voire punk tout court, nous rappelle que c'est bien Suicide l'influence la plus importante de la musique du groupe, voire de la musique tout court (mais ça c'est un avis personnel). J'aurais plus de mal à qualifier l'étonnante "Woman In The Red"... Disco industrielle ? En tous cas c'est bien. La synthpop super classe d'"Impromptu" se situe quelque part entre Francis Bebey, Scientist et Empire Of The Sun, tandis que "Looking For Love" déconstruit de façon assez novatrice la house, un peu comme dans les débuts du hip-hop ou dans My Life In The Bush Of Ghosts (1981) de David Byrne et Brian Eno.

  Si on veut faire court, on dira que c'est un retour plus que gagnant, sans temps faible, avec de grandes chansons bien écrites et une façon de les mettre en son très personnelle, entre post-punk et pop électronique. Et puis toujours ce chant très incarné de Sabine Sciubba qui fait tout le sel des Brazilian Girls.       

Ecouter sur Bandcamp, Spotify, ou Deezer


Alex


2 commentaires:

  1. Ce qui m'avait freiné était la note de LASPYKE "Après une décennie de silence, il revient, mais n'a semble-t-il conservé que le côté indie synth-pop la plus banale dans ses bagages. Décevant! "
    Ce groupe je le découvre il y a 10 ans pour le premier album. Il aura fallu que je te lise enthousiaste pour m'y recoller.
    J'ai bien fait, avec mes oreilles fraîches de la journée, premier disque du matin, je trouve l'album agréablement pop. LASPYKE est sévère dans sa déception mais assez juste dans sa restriction. Dans le premier album il y avait cette touche retro futuriste dansant que j'aimais bien (All we have, Lazy Lover). Là, je me retrouve en terrain plus familier, que tu décris une fois encore bien... ce qui m'a fait y revenir. Encore un ou deux trucs repérés chez vous A+

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    1. Merci ! C'est plus classiquement pop en effet mais je ne trouve pas qu'on perde au change, il y a une densité de l'instrumentation assez inédite chez eux. C'est une approche différente.
      Merci à +

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