Les aventures musicales de deux potes

Les aventures musicales de deux potes

mercredi 9 mai 2018

Iceage - Beyondless (2018)


  Le groupe post-hardcore danois Iceage nous avait laissé en 2014 son magnum opus, le magnifique Plowing Into The Field Of Love, sur lequel leur son s'était volontiers fait davantage post-punk, entre touches de glam et noirceur gothique. C'est dans cette veine plus accessible mais tout autant vénéneuse, si ce n'est plus encore, que se situe ce Beyondless

  Entre poésie noire et punk référencé, "Hurrah" fait penser à Johnny Thunders & The Heartbreakers mais surtout aux Saints aventureux d'Eternally Yours, et sa suite "Pain Killer" utilise les cuivres sur du punk comme les australiens le faisaient en 1978 sur "Know Your Product". Mais "Pain Killer" n'est pas que ça, ce croisement entre fureur, classic rock, chaleur Motown et chant pop grâce à la présence vocale de Sky Ferreira, permettant d'assouvir le double penchant avoué du chanteur Elias Bender Ronnenfelt pour l'underground sombre et lettré et pour la flamboyance des plus grosses rockstars. Un peu à la manière de Nick Cave, qui réalise la synthèse des deux mondes. 

Iceage & Sky Ferreira - Pain Killer (2018)

  Ces cuivres sont réutilisés avec brio sur la très Stooges période Fun House "The Day The Music Dies", d'abord comme contrepoint soul-rock au garage limite psyché, avant de virer free jazz (une des influences déterminantes de l'album, amenant cette instrumentation nouvelle). 

Iceage - The Day The Music Dies (Clip, 2018)

  Sur "Plead The Filth", le blues et la folk dénaturés par le groupe voient également les instruments inhabituels (piano, guitare folk, xylophone) se succéder dans le maëlstrom formé par la guitare, la basse et la batterie, servant de tapis (d'échardes) au chant de Ronnenfelt décidément très Iggy Pop par moments. La quasi country/folk bluesy et déviante de "Thieves Like Us" opère de la même façon, dans un registre plus proche des Doors, ambiance que l'on retrouve sur la pop de saloon absurde de "Showtime", étrangement cousine, d'une façon indirecte, du travail de Foxygen

  Plus loin, c'est entre un folk oblique à la XTC, un chant à la Robert Smith de The Cure (influence déterminante tout au long de l'album), une no wave bruitiste et agressive à la Sonic Youth et un free jazz en roue libre qu'il faut chercher les inspirations de la déstabilisante et géniale "Under The Sun", véritable petit monument qui claquerait le bec à n'importe quel passéiste du genre et petit miracle d'équilibre créatif. Cette veine de psychédélisme sombre et de romantisme gothique s'épanouit à merveille sur "Catch It", mélancolique, prenante et belle. 

Iceage - Catch It (Clip, 2018)

  C'est au shoegaze planant et dense de My Bloody Valentine qu'on pensera sur la plombée "Beyondless" et sur "Take It All" (et à la musique irlandaise un peu également sur cette dernière), preuve de l'immense source d'influences digérées par le groupe et de la variété incroyable de leur son. Cette vitalité et ce bouillonnement sont particulièrement bien illustrés sur la pochette, entre coupe histologique, magma d'une composition inconnue, et art contemporain.

Iceage - Take It All (2018)

  C'est un album volcanique, empli de fureur, de mélancolie, d'urgence et de beauté qu'on doit à Iceage, confirmant la belle lancée du groupe après la réussite du précédent en 2014, et asseyant et sa place parmi les groupes de rock les plus intéressants et les plus essentiels de la décennie. A écouter absolument.

Ecouter sur Spotify ou Deezer

Alex


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